Friday 24 June 2016

Catéchèse a Propos de la Famille (10.1): "Le Mariage" par Pape François I (translated into French)



Place Saint-Pierre, Mercredi 29 avril 2015

Chers frères et sœurs, bonjour !
         Notre réflexion sur le dessein originel de Dieu sur le couple homme-femme, après avoir considéré les deux récits du Livre de la Genèse, s’adresse à présent directement à Jésus.
           L’évangéliste Jean, au début de son Évangile, rapporte l’épisode des noces de Cana, auxquelles étaient présentes la Vierge Marie et Jésus, avec ses premiers disciples (cf. Jn 2, 1-11). Jésus non seulement participa à ce mariage, mais il « sauva la fête » avec le miracle du vin ! Il accomplit donc le premier de ses signes prodigieux, par lequel il révèle sa gloire, dans le cadre d’un mariage, et ce fut un geste de grande sympathie pour cette famille naissante, sollicité par la préoccupation maternelle de Marie. Cela nous rappelle le livre de la Genèse, lorsque Dieu finit l’œuvre de la création et fait son chef-d’œuvre ; le chef-d’œuvre est l’homme et la femme. Et ici, Jésus commence précisément ses miracles par ce chef-d’œuvre, dans un mariage, des noces : un homme et une femme. Ainsi, Jésus nous enseigne que le chef-d’œuvre de la société est la famille : l’homme et la femme qui s’aiment ! Voilà le chef-d’œuvre !
            Depuis l’époque des noces de Cana, beaucoup de choses ont changé, mais ce « signe » du Christ contient un message toujours valable.
            Aujourd’hui, il ne semble pas facile de parler du mariage comme d’une fête qui se renouvelle dans le temps, dans les diverses périodes de toute la vie des conjoints. C’est un fait, les personnes qui se marient sont toujours moins nombreuses ; cela est un fait : les jeunes ne veulent pas se marier. Dans de nombreux pays augmente en revanche le nombre des séparations, tandis que diminue le nombre des enfants. La difficulté à rester ensemble — tant comme couple, que comme famille — conduit à rompre les liens avec toujours plus de fréquence et de rapidité, et les enfants sont précisément les premiers à en subir les conséquences. Mais pensons que les premières victimes, les victimes les plus importantes, les victimes qui souffrent le plus dans une séparation sont les enfants. Si l’on fait l’expérience dès l’enfance du fait que le mariage est un lien « à durée déterminée », inconsciemment pour nous, il en sera ainsi. En effet, de nombreux jeunes sont conduits à renoncer au projet même d’un lien irrévocable et d’une famille durable. Je crois que nous devons réfléchir de façon très sérieuse sur la raison pour laquelle tant de jeunes « n’ont pas envie » de se marier. Il y a cette culture du provisoire... Tout est provisoire, il semble qu’il n’y ait rien de définitif.
            Le fait que les jeunes ne veulent pas se marier est une des préoccupations qui apparaissent aujourd’hui: pourquoi les jeunes ne se marient-ils pas ? Pourquoi préfèrent-ils souvent un concubinage, et très souvent « à responsabilité limitée ? » ; pourquoi beaucoup de personnes — également parmi les baptisés — ont-elles peu de confiance dans le mariage et dans la famille ? Il est important de chercher à comprendre, si nous voulons que les jeunes puissent trouver la voie juste à parcourir. Pourquoi n’ont-ils pas confiance dans la famille ?
            Les difficultés ne sont pas seulement à caractère économique, bien que celles-ci soient vraiment sérieuses. Beaucoup de personnes considèrent que le changement qui a eu lieu ces dernières décennies s’est amorcé à la suite de l’émancipation de la femme. Mais même cet argument n’est pas valable, cela est faux, ce n’est pas vrai ! C’est une forme de machisme, qui veut toujours dominer la femme. Nous faisons la piètre figure qu’a faite Adam quand Dieu lui a dit : « Mais pourquoi as-tu mangé le fruit de l’arbre ?, et qu’il a répondu : « La femme me l’a donné ». Et la faute est attribuée à la femme. Pauvre femme ! Nous devons défendre les femmes ! En réalité, presque tous les hommes et les femmes voudraient une sécurité affective stable, un mariage solide et une famille heureuse. La famille est au sommet de tous les critères de satisfaction chez les jeunes ; mais, par peur de se tromper, beaucoup d’entre eux ne veulent même pas y penser ; bien qu’étant chrétiens, ils ne pensent pas au mariage sacramentel, signe unique et irremplaçable de l’alliance, qui devient témoignage de la foi. C’est peut-être précisément cette peur de l’échec qui représente le plus grand obstacle à l’accueil de la parole du Christ, qui promet sa grâce à l’union conjugale et à la famille.
            Le témoignage le plus persuasif de la bénédiction du mariage chrétien est la bonne vie des époux chrétiens et de la famille. Il n’y a pas de meilleure façon de traduire la beauté du sacrement ! Le mariage consacré par Dieu protège ce lien entre l’homme et la femme que Dieu a béni dès la création du monde ; et il est source de paix et de bien pour toute la vie conjugale et familiale. Dans les premiers temps du christianisme, par exemple, cette grande dignité du lien entre l’homme et la femme fit disparaître un abus alors considéré comme tout à fait normal, c’est-à- dire le droit des maris de répudier leurs femmes, même pour des motifs les plus fallacieux et humiliants. L’Évangile de la famille, l’Évangile qui annonce précisément ce sacrement a vaincu cette culture de la répudiation habituelle.
            La semence chrétienne de l’égalité radicale entre les conjoints doit aujourd’hui porter de nouveaux fruits. Le témoignage de la dignité sociale du mariage deviendra persuasif précisément par cette voie, la voie du témoignage qui attire, la voie de la réciprocité entre eux, de la complémentarité entre eux.
            C’est pourquoi, en tant que chrétiens, nous devons devenir plus exigeants à cet égard. Par exemple : soutenir fermement le droit à une rétribution égale pour un travail égal ; pourquoi pense-t-on qu’il est évident que les femmes doivent moins gagner que les hommes ? Non ! Elles ont les mêmes droits. L’inégalité est un pur scandale ! Dans le même temps, reconnaître comme une richesse toujours valable la maternité des femmes et la paternité des hommes, en particulier au bénéfice des enfants. De même, la vertu de l’hospitalité des familles chrétiennes revêt aujourd’hui une importance cruciale, en particulier dans les situations de pauvreté, de dégradation, de violence familiale.
            Chers frères et sœurs, n’ayons pas peur d’inviter Jésus à nos noces, de l’inviter chez nous, pour qu’il soit présent avec nous et protège notre famille. Et n’ayons pas peur d’inviter également sa Mère Marie ! Les chrétiens, quand ils se marient « dans le Seigneur », sont transformés en un signe concret de l’amour de Dieu. Les chrétiens ne se marient pas seulement pour eux-mêmes : ils se marient dans le Seigneur en faveur de toute la communauté, de la société tout entière.
            Je parlerai aussi dans ma prochaine catéchèse de cette belle vocation du mariage chrétien.
            Je salue cordialement les pèlerins de langue française, particulièrement les prêtres du diocèse de Beauvais, avec leur Évêque Mgr Benoît-Gonnin, les jeunes de Marseille, avec l’Archevêque Mgr Pontier et les nombreux pèlerins venus de France. Je vous invite à vivre la fraternité, l’accueil et le partage, en véritables disciples du Christ. Que Dieu vous bénisse !

Thursday 23 June 2016

Sonnet XXXVI by William Shakespeare (in English)

Let me confess that we two must be twain,
Although our undivided loves are one:
So shall those blots that do with me remain,
Without thy help, by me be borne alone.
In our two loves there is but one respect,
Though in our lives a separable spite,
Which though it alter not love's sole effect,
Yet doth it steal sweet hours from love's delight.
I may not evermore acknowledge thee,
Lest my bewailed guilt should do thee shame,
Nor thou with public kindness honour me,
Unless thou take that honour from thy name:
   But do not so, I love thee in such sort,
   As thou being mine, mine is thy good report.

Wednesday 22 June 2016

Jesuítas (século XIII) by Castro Alves (in Portuguese)



 Ó mês frères, je viens vous apporter mon Dieu,
Je viens vous apporter ma tête!
V. Hugo
(Châtiments)


Quando o vento da Fé soprava Europa,
Como o tufão, que impele ao ar a tropa
Das águias, que pousavam no alcantil;
Do zimbório de Roma — a ventania
O bando dos Apost'los sacudia
Aos cerros do Brasil.

Tempos idos! Extintos luzimentos!
O pó da catequese aos quatro ventos
Revoava nos céus...
Floria após na India, ou na Tartária,
No Mississipi, no Peru, na Arábia
Uma palmeira — Deus! —

O navio maltês, do Lácio a vela,
A lusa nau, as quinas de Castela,
Do Holandês a galé
Levava sem saber ao mundo inteiro
Os vândalos sublimes do cordeiro,
Os átilas da fé.

Onde ia aquela nau? — Ao Oriente.
A outra? — Ao pólo. A outra? — Ao ocidente.
Outra? — Ao norte. Outra? — Ao sul.
E o que buscava? A foca além no pólo;
O âmbar, o cravo no indiano solo,
Mulheres em 'Stambul.

Ouro — na Austrália; pedras — em Misora!. .
"Mentira!" respondia em voz canora
O filho de Jesus...
"Pescadores!... nós vamos no mar fundo
"Pescar almas p'ra o Cristo em todo mundo,
"Com um anzol — a cruz —!"

Homens de ferro! Mal na vaga fria
Colombo ou Gama um trilho descobria
Do mar nos escarcéus,
Um padre atravessava os equadores,
Dizendo: "Gênios!... sois os batedores
Da matilha de Deus."

Depois as solidões surpresas viam
Esses homens inermes, que surgiam
Pela primeira vez.
E a onça recuando s'esgueirava
Julgando o crucifixo... alguma clava
Invencível talvez!

O martírio, o deserto, o cardo, o espinho,
A pedra, a serpe do sertão maninho,
A fome, o frio, a dor,
Os insetos, os rios, as lianas,
Chuvas, miasmas, setas e savanas,
Horror e mais horror ...

Nada turbava aquelas frontes calmas,
Nada curvava aquelas grandes almas
Voltadas p'ra amplidão...
No entanto eles só tinham na jornada
Por couraça — a sotaina esfarrapada...
E uma cruz — por bordão.

Um dia a taba do Tupi selvagem
Tocava alarma... embaixo da folhagem
Rangera estranho pé...
O caboclo da rede ao chão saltava,
A seta ervada o arco recurvava...
Estrugia o boré.

E o tacape brandindo, a tribo fera
De um tigre ou de um jaguar ficava à espera
Com gesto ameaçador...
Surgia então no meio do terreiro
O padre calmo, santo, sobranceiro,
O Piaga do amor.

Quantas vezes então sobre a fogueira,
Aos estalos sombrios da madeira,
Entre o fumo e a luz...
A voz do mártir murmurava ungida
"Irmãos! Eu vim trazer-vos — minha vida...
Vim trazer-vos — Jesus!"

Grandes homens! Apóstolos heróicos!...
Eles diziam mais do que os estóicos:
"Dor, — tu és um prazer!
"Grelha, — és um leito! Brasa, — és uma gema!
Cravo, — és um cetro! Chama, — um diadema
Ó morte, — és o viver!"

Outras vezes no eterno itinerário
O sol, que vira um dia no Calvário
Do Cristo a santa cruz,
Enfiava de vir achar nos Andes
A mesma cruz, abrindo os braços grandes
Aos índios rubros, nus.

Eram eles que o verbo do Messias
Pregavam desde o vale às serranias,
Do pólo ao Equador...
E o Niagara ia contar aos mares...
E o Chimborazo arremessava aos ares
O nome do Senhor!...

Tuesday 21 June 2016

Three Untitled Poems by José Thiesen (in Portuguese)

Uma borboleta passa
por minha janela -
o meu coração se alegra.

***

Crocita o corvo no parque,
folhas secas voam por mim -
teu coração me alegra.

***

Novo dia nasce, manhã amarela d'outono.
Dormes solto na cama e longe canta o galo vermelho.
Acordo-te com meu beijo azul.

Monday 20 June 2016

"Mad Journey!" by Al Feldstein (in English)

art by Al Williamson, Frank Frazetta, and Roy Krenkel (Venusian landscape pages 6-7) -  Weird Fantasy #14 - I. C. Publishing Co., Inc., July-August 1952. 










Friday 17 June 2016

“La belle au bois dormant” by Charles Perrault (in French)



Il était une fois un roi et une reine qui étaient si fâchés de n'avoir point d'enfants, si fâchés qu'on ne saurait dire. Ils allèrent à toutes les eaux du monde, voeux, pèlerinages, menues dévotions; tout fut mis en oeuvre, et rien n'y faisait. Enfin pourtant la reine devint grosse, et accoucha d'une fille: on fit un beau baptême; on donna pour marraines à la petite princesse toutes les fées qu'on pût trouver dans le pays (il s'en trouva sept), afin que chacune d'elles lui faisant un don, comme c'était la coutume des fées en ce temps-là, la princesse eût par ce moyen toutes les perfections imaginables.
            Après les cérémonies du baptême toute la compagnie revint au palais du roi, où il y avait un grand festin pour les fées. On mit devant chacune d'elles un couvert magnifique, avec un étui d'or massif, où il y avait une cuiller, une fourchette, et un couteau de fin or, garni de diamants et de rubis. Mais comme chacun prenait sa place à table. On vit entrer une vieille fée qu'on n'avait point priée parce qu'il y avait plus de cinquante ans qu'elle n'était sortie d'une tour et qu'on la croyait morte, ou enchantée. Le roi lui fit donner un couvert, mais il n'y eut pas moyen de lui donner un étui d'or massif, comme aux autres, parce que l'on n'en avait fait faire que sept pour les sept fées. La vieille crut qu'on la méprisait, et grommela quelques menaces entre ses dents. Une des jeunes fées qui se trouva auprès d'elle l'entendit, et jugeant qu'elle pourrait donner quelque fâcheux don à la petite princesse, alla, dès qu'on fut sorti de table, se cacher derrière la tapisserie, afin de parler la dernière, et de pouvoir réparer autant qu'il lui serait possible le mal que la vieille aurait fait.
            Cependant les fées commencèrent à faire leurs dons à la princesse. La plus jeune lui donna pour don qu'elle serait la plus belle du monde, celle d'après qu'elle aurait de l'esprit comme un ange, la troisième qu'elle aurait une grâce admirable à tout ce qu'elle ferait, la quatrième qu'elle danserait parfaitement bien, la cinquième qu'elle chanterait comme un rossignol, et la sixième qu'elle jouerait de toutes sortes d'instruments à la perfection. Le rang de la vieille fée étant venu, elle dit en branlant la tête, encore plus de dépit que de vieillesse, que la princesse se percerait la main d'un fuseau, et qu'elle en mourrait.
            Ce terrible don fit frémir toute la compagnie, et il n'y eut personne qui ne pleurât. Dans ce moment la jeune fée sortit de derrière la tapisserie, et dit tout haut ces paroles: "Rassurez-vous, roi et reine, votre fille n'en mourra pas: il est vrai que je n'ai pas assez de puissance pour défaire entièrement ce que mon ancienne a fait. La princesse se percera la main d'un fuseau; mais au lieu d'en mourir, elle tombera seulement dans un profond sommeil qui durera cent ans, au bout desquels le fils d'un roi viendra la réveiller."
            Le roi, pour tâcher d'éviter le malheur annoncé par la vieille, fit publier aussitôt un édit, par lequel il défendait à tous de filer au fuseau, ni d'avoir des fuseaux chez soi sous peine de mort. Au bout de quinze ou seize ans, le roi et la reine étant allés à une de leurs maisons de plaisance, il arriva que la jeune princesse courant un jour dans le château, et montant de chambre en chambre, alla jusqu'au haut d'un donjon dans un petit galetas, où une bonne vieille était seule à filer sa quenouille. Cette bonne femme n'avait point entendu parler des défenses que le roi avait faites de filer au fuseau.
-"Que faites-vous là, ma bonne femme?" dit la princesse.
-"Je file, ma belle enfant" lui répondit la vieille qui ne la connaissait pas.
-"Ha! que cela est joli" reprit la princesse, "comment faites-vous? Donnez-moi que je voie si j'en ferais bien autant."
Elle n'eut pas plus tôt pris le fuseau, que comme elle était fort vive, un peu étourdie, et que d'ailleurs l'arrêt des fées l'ordonnait ainsi, elle s'en perça la main, et tomba évanouie.
            La bonne vieille, bien embarrassée, crie au secours: on vient de tous côtés, on jette de l'eau au visage de la princesse, on la délace, on lui frappe dans les mains, on lui frotte les tempes avec de l'eau de la reine de Hongrie; mais rien ne la faisait revenir. Alors le roi, qui était monté au bruit, se souvint de la prédiction des fées, et jugeant bien qu'il fallait que cela arrivât, puisque les fées l'avaient dit, fit mettre la princesse dans le plus bel appartement du palais, sur un lit en broderie d'or et d'argent. On eût dit d'un ange, tant elle était belle; car son évanouissement n'avait pas ôté les couleurs vives de son teint: ses joues étaient incarnates, et ses lèvres comme du corail; elle avait seulement les yeux fermés, mais on l'entendait respirer doucement, ce qui montrait bien qu'elle n'était pas morte. Le roi ordonna qu'on la laissât dormir, jusqu'à ce que son heure de se réveiller fût venue.
            La bonne fée qui lui avait sauvé la vie, en la condamnant à dormir cent ans, était dans le royaume de Mataquin, à douze mille lieues de là, lorsque l'accident arriva à la princesse; mais elle en fut avertie en un instant par un petit nain, qui avait des bottes de sept lieues (c'était des bottes avec lesquelles on faisait sept lieues d'une seule enjambée). La fée partit aussitôt, et on la vit au bout d'une heure arriver dans un chariot tout de feu, traîné par des dragons. Le roi lui alla présenter la main à la descente du chariot. Elle approuva tout ce qu'il avait fait; mais comme elle était grandement prévoyante, elle pensa que quand la princesse viendrait à se réveiller, elle serait bien embarrassée toute seule dans ce vieux château.
            Voici ce qu'elle fit: elle toucha de sa baguette tout ce qui était dans ce château (hors le roi et la reine), gouvernantes, filles d'honneur, femmes de chambre, gentilshommes, officiers, maîtres d'hôtel, cuisiniers, marmitons, galopins, gardes, suisses, pages, valets de pied; elle toucha aussi tous les chevaux qui étaient dans les écuries, avec les palefreniers, les gros mâtins de basse-cour, et Pouffe, la petite chienne de la princesse, qui était auprès d'elle sur son lit. Dès qu'elle les eut touchés, ils s'endormirent tous, pour ne se réveiller qu'en même temps que leur maîtresse, afin d'être tout prêts à la servir quand elle en aurait besoin: les broches mêmes qui étaient au feu toutes pleines de perdrix et de faisans s'endormirent, et le feu aussi.
            Tout cela se fit en un moment; les fées n'étaient pas longues à leur besogne. Alors le roi et la reine, après avoir embrassé leur chère enfant sans qu'elle s'éveillât, sortirent du château, et firent publier des défenses à qui que ce soit d'en approcher. Ces défenses n'étaient pas nécessaires, car il crût dans un quart d'heure tout autour du parc une si grande quantité de grands arbres et de petits, de ronces et d'épines entrelacées les unes dans les autres, que bête ni homme n'y aurait pu passer: en sorte qu'on ne voyait plus que le haut des tours du château, encore n'était-ce que de bien loin. On ne douta point que la fée n'eût encore fait là un tour de son métier, afin que la princesse, pendant qu'elle dormirait, n'eût rien à craindre des curieux.
            Au bout de cent ans, le fils du roi qui régnait alors, et qui était d'une autre famille que la princesse endormie, étant allé à la chasse de ce côté-là, demanda ce que c'était que ces tours qu'il voyait au-dessus d'un grand bois fort épais; chacun lui répondit selon qu'il en avait ouï parler. Les uns disaient que c'était un vieux château où il revenait des esprits; les autres que tous les sorciers de la contrée y faisaient leur sabbat. La plus commune opinion était qu'un ogre y demeurait, et que là il emportait tous les enfants qu'il pouvait attraper, pour pouvoir les manger à son aise, et sans qu'on le pût suivre, ayant seul le pouvoir de se faire un passage au travers du bois. Le Prince ne savait qu'en croire, lorsqu'un vieux paysan prit la parole, et lui dit:
-"Mon prince, il y a plus de cinquante ans que j'ai entendu dire de mon père qu'il y avait dans ce château une princesse, la plus belle du monde; qu'elle devait y dormir cent ans, et qu'elle serait réveillée par le fils d'un roi, à qui elle était réservée."
            Le jeune prince à ce discours se sentit tout de feu; il crut sans hésiter qu'il mettrait fin à une si belle aventure; et poussé par l'amour et par la gloire, il résolut de voir sur-le-champ ce qu'il en était. A peine s'avança-t-il vers le bois, que tous ces grands arbres, ces ronces et ces épines s'écartèrent d'eux-mêmes pour le laisser passer: il marche vers le château qu'il voyait au bout d'une grande avenue où il entra, et ce qui le surprit un peu, il vit que personne de ses gens ne l'avait pu suivre, parce que les arbres s'étaient rapprochés dès qu'il avait été passé. Il continua donc son chemin: un prince jeune et amoureux est toujours vaillant. Il entra dans une grande avant-cour où tout ce qu'il vit d'abord était capable de le glacer de crainte: c'était un silence affreux, l'image de la mort s'y présentait partout, et ce n'était que des corps étendus d'hommes et d'animaux, qui paraissaient morts. Il reconnut pourtant bien au nez bourgeonné et à la face vermeille des Suisses qu'ils n'étaient qu'endormis, et leurs tasses, où il y avait encore quelques gouttes de vin, montraient assez qu'ils s'étaient endormis en buvant. Il passe une grande cour pavée de marbre, il monte l'escalier, il entre dans la salle des gardes qui étaient rangés en haie, l'arme sur l'épaule, et ronflants de leur mieux. Il traverse plusieurs chambres pleines de gentilshommes et de dames, dormant tous, les uns debout, les autres assis; il entre dans une chambre toute dorée, et il vit sur un lit, dont les rideaux étaient ouverts de tous côtés, le plus beau spectacle qu'il eût jamais vu: une princesse qui paraissait avoir quinze ou seize ans, et dont l'éclat resplendissant avait quelque chose de lumineux et de divin. Il s'approcha en tremblant et en admirant, et se mit à genoux auprès d'elle.
            Alors comme la fin de l'enchantement était venue, la; princesse s'éveilla; et le regardant avec des yeux plus tendres qu'une première vue ne semblait le permettre: "Est-ce vous, mon prince? Lui dit-elle, vous vous êtes bien fait attendre." Le prince, charmé de ces paroles, et plus encore de la manière dont elles étaient dites, ne savait comment lui témoigner sa joie et sa reconnaissance; il l'assura qu'il l'aimait plus que lui-même. Ses discours furent mal rangés, ils en plurent davantage: peu d'éloquence, beaucoup d'amour. Il était plus embarrassé qu'elle, et l'on ne doit pas s'en étonner; elle avait eu le temps de songer à ce qu'elle aurait à lui dire, car il y a apparence (l'histoire n'en dit pourtant rien) que la bonne fée, pendant un si long sommeil, lui avait procuré le plaisir des songes agréables. Enfin il y avait quatre heures qu'ils se parlaient, et ils ne s'étaient pas encore dit la moitié des choses qu'ils avaient à se dire.
            Cependant tout le palais s'était réveillé avec la princesse; chacun songeait à faire sa charge, et comme ils n'étaient pas tous amoureux, ils mouraient de faim; la dame d'honneur, pressée comme les autres, s'impatienta, et dit tout haut à la princesse que la viande était servie. Le prince aida la princesse à se lever; elle était tout habillée et fort magnifiquement; mais il se garda bien de lui dire qu'elle était habillée comme ma grand-mère, et qu'elle avait un collet monté: elle n'en était pas moins belle. Ils passèrent dans un salon de miroirs, et y soupèrent, servis par les officiers de la princesse; les violons et les hautbois jouèrent de vieilles pièces, mais excellentes, quoiqu'il y eût près de cent ans qu'on ne les jouât plus; et après souper, sans perdre de temps, le grand aumônier les maria dans la chapelle du château, et la dame d'honneur leur tira le rideau: ils dormirent peu, la princesse n'en avait pas grand besoin, et le prince la quitta dès le matin pour retourner à la ville, où son père devait être en peine de lui. Le prince lui dit qu'en chassant il s'était perdu dans la forêt, et qu'il avait couché dans la hutte d'un charbonnier, qui lui avait fait manger du pain noir et du fromage. Le roi son père, qui était bon homme, le crut, mais sa mère n'en fut pas bien persuadée, et voyant qu'il allait presque tous les jours à la chasse, et qu'il avait toujours une raison pour s'excuser, quand il avait couché deux ou trois nuits dehors, elle ne douta plus qu'il n'eût quelque amourette: car il vécut avec la princesse plus de deux ans entiers, et en eut deux enfants, dont le premier, qui fut une fille, fut nommée l'Aurore, et le second un fils, qu'on nomma le Jour, parce qu'il paraissait encore plus beau que sa soeur. La reine dit plusieurs fois à son fils, pour le faire s'expliquer, qu'il fallait se contenter dans la vie, mais il n'osa jamais lui confier son secret; il la craignait quoiqu'il l'aimât, car elle était de race ogresse, et le roi ne l'avait épousée qu'à cause de ses grands biens; on disait même tout bas à la cour qu'elle avait les inclinations des ogres, et qu'en voyant passer de petits enfants, elle avait toutes les peines du monde à se retenir de se jeter sur eux; ainsi le prince ne voulut jamais rien dire. Mais quand le roi fut mort, ce qui arriva au bout de deux ans, et qu'il se vit le maître, il déclara publiquement son mariage, et alla en grande cérémonie cherche la reine sa femme dans son château. On lui fit une entrée magnifique dans la ville capitale, où elle entra au milieu de ses deux enfants. Quelque temps après, le roi alla faire la guerre à l'empereur Cantalabutte son voisin. Il laissa la régence du royaume à la reine sa mère, et lui recommanda vivement sa femme et ses enfants: il devait être à la guerre tout l'été, et dès qu'il fut parti, la reine-mère envoya sa bru et ses enfants à une maison de campagne dans les bois, pour pouvoir plus aisément assouvir son horrible envie. Elle y alla quelques jours après, et dit un soir à son maître d'hôtel:
-"Je veux manger demain à mon dîner la petite Aurore".
-"Ah! Madame", dit le maître d'hôtel.
-" Je le veux", dit la reine (et elle le dit d'un ton d'ogresse qui a envie de manger de la chair fraîche), " et je veux la manger à la sauce-robert."
Ce pauvre homme, voyant bien qu'il ne fallait pas se jouer d'une ogresse, prit son grand couteau, et monta à la chambre de la petite Aurore: elle avait alors quatre ans, et vint en sautant et en riant se jeter à son cou, et lui demander du bonbon. Il se mit à pleurer, le couteau lui tomba des mains, et il alla dans la basse-cour couper la gorge à un petit agneau, et lui fit une si bonne sauce que sa maîtresse l'assura qu'elle n'avait jamais rien mangé de si bon. Il avait emporté en même temps la petite Aurore, et l'avait donnée à sa femme pour la cacher dans le logement qu'elle avait au fond de la basse-cour. Huit jours après, la méchante reine dit à son maître d'hôtel:
-"Je veux manger à mon souper le petit Jour."
Il ne répliqua pas, résolu de la tromper comme l'autre fois; il alla chercher le petit Jour, et le trouva avec un petit fleuret à la main, dont il faisait des armes avec un gros singe: il n'avait pourtant que trois ans. Il le porta à sa femme qui le cacha avec la petite Aurore, et donna à la place du petit Jour un petit chevreau fort tendre, que l'ogresse trouva admirablement bon.
            Cela avait fort bien été jusque-là, mais un soir cette méchante reine dit au maître d'hôtel: "Je veux manger la reine à la même sauce que ses enfants." Ce fut alors que le pauvre maître d'hôtel désespéra de pouvoir encore la tromper. La jeune reine avait vingt ans passés, sans compter les cent ans qu'elle avait dormi: sa peau était un peu dure, quoique belle et blanche; et le moyen de trouver dans la ménagerie une bête aussi dure que cela? Il prit la résolution, pour sauver sa vie, de couper la gorge à la reine, et monta dans sa chambre, dans l'intention de n'en pas faire à deux fois; il s'excitait à la fureur, et entra le poignard à la main dans la chambre de la jeune reine. Il ne voulut pourtant point la surprendre, et il lui dit avec beaucoup de respect l'ordre qu'il avait reçu de la reine-mère.
-"Faites votre devoir", lui dit-elle, en lui tendant le cou; "exécutez l'ordre qu'on vous a donné; j'irai revoir mes enfants, mes pauvres enfants que j'ai tant aimés"; car elle les croyait morts depuis qu'on les avait enlevés sans rien lui dire.
-"Non, non, Madame, lui répondit le pauvre maître d'hôtel tout attendri, vous ne mourrez point, et vous pourrez revoir vos chers enfants, mais ce sera chez moi où je les ai cachés, et je tromperai encore la reine, en lui faisant manger une jeune biche en votre place."
            Il la mena aussitôt à sa chambre, où la laissant embrasser ses enfants et pleurer avec eux, il alla accommoder une biche, que la reine mangea à son souper, avec le même appétit que si c'eût été la jeune reine. Elle était bien contente de sa cruauté, et elle se préparait à dire au roi, à son retour, que les loups enragés avaient mangé la reine sa femme et ses deux enfants.
            Un soir qu'elle rôdait comme d'habitude dans les cours et basses-cours du château pour y humer quelque viande fraîche, elle entendit dans une salle basse le petit Jour qui pleurait, parce que la reine sa mère le voulait faire fouetter, parce qu'il avait été méchant, et elle entendit aussi la petite Aurore qui demandait pardon pour son frère. L'ogresse reconnut la voix de la reine et de ses enfants, et furieuse d'avoir été trompée, elle commande dès le lendemain au matin, avec une voix épouvantable, qui faisait trembler tout le monde, qu'on apportât au milieu de la cour une grande cuve, qu'elle fit remplir de crapauds, de vipères, de couleuvres et de serpents, pour y faire jeter la reine et ses enfants, le maître d'hôtel, sa femme et sa servante: elle avait donné ordre de les amener les mains liées derrière le dos. Ils étaient là, et les bourreaux se préparaient à les jeter dans la cuve, Lorsque le roi, qu'on n'attendait pas si tôt, entra dans la cour à cheval; il était venu en poste, et demanda tout étonné ce que voulait dire cet horrible spectacle; personne n'osait l'en instruire, quand l'ogresse, enragée de voir ce qu'elle voyait, se jeta elle-même la tête la première dans la cuve, et fut dévorée en un instant par les vilaines bêtes qu'elle y avait fait mettre. Le roi ne put s'empêcher d'en être fâché, car elle était sa mère; mais il s'en consola bientôt avec sa belle femme et ses enfants.

Thursday 16 June 2016

Untitled Poem by José Thiesen (in Portuguese)

Quero estar onde estás,
falar com quem falas,
ver tudo o que tu vês.

Onde estou é tão triste,
pessoas mudas, cinza mundo,
tão diferente donde vives
tua vida dourada, sob a
vista benigna do Sol.

Queria ser um pouco feliz,
queria experimentar um pouco
de amor, um pouco ao menos,
de qualquer coisinha boa.

Mas toda a alegria se foi de mim e
meus olhos cegos procuram por ti,
e a solidão me consome a alma.

Há lodo em minha boca, correram
por mim os anos, sou velho e não
morro, sou um sonho inútil.

Um poço de anos, um
vaso de lágrimas, um
grito de dor - e não morro!

O amanhã, um vazio trevoso,
uma dor que se acumula
no futuro e se distribui hoje.

Meu corpo esfriou ,
o coração secou -
e não morro! O descanso do
esquecimento, meu por direito,
me é negado -
e não morro!

A luz de tua vida
te afasta das trevas
da minha e, sem ti,
minha treva aumenta.

Será isso parte do plano de Deus?
Para quê tanta dor, causada por amor?
Grande é Deus, pequeno sou eu e
para mim nada mais peço que o fim
da minha dor, essa dor que permance.