Showing posts with label Anatole France. Show all posts
Showing posts with label Anatole France. Show all posts

Thursday, 22 December 2016

Lettre de Jeanne d'Arc aux Hussites (en Latin et en Français)



 Jesus, Maria.
 Jam dudum michi Johanne puelle rumor ipse famaque pertulit quod, ex veris christianis heretici et sarraceni[s] similes facti, veram religionem atque cultum sustulistis, assumpsistisque superstitionem fedam ac nefariam, quam dum tueri et augere studetis, nulla est turpitudo neque crudelitas quam non audeatis: sacramenta ecclesie labefactatis, articulos fidei laniatis, templa diruitis, simulacra, que memorie causa sunt confecta, perfringitis ac succenditis, Kristianos quod vestram teneant fidem trucidatis. Quis hic vester furor est, aut que vos insania et rabies agitat? Quam Deus omnipotens, quam Filius, quam Spiritus Sanctus excitavit, instituit, extulit et mille modis, mille miraculis illustravit, eam vos fidem persequimini, eam evertere, eam exterminare cogitatis. Vos vos cæci estis et non qui visu et oculis carent. Numquid creditis impunes abituros, aut ignoratis ideo Deum non impedire vestros nefarios conatus permittereque in tenebris vos et errore versari, ut quanto magis in scelere eritis et sacrilegiis debachati, tanto majorem vobis penam atque supplicia paret? Ego vero, ut quod verum est fateor, nisi in bellis Anglicis essem occupata, jam pridem visitatum vos venyssem: verumtamen nisi emendatos vos intelligam, dimittam forte Anglicos adversusque vos proficiscar, ut ferro, si alio modo non possum, hanc vanam vestram et obscenam superstitionem exterminem, vosque vel heresi privem vel vita. Sed si ad katholicam fidem et pristinam lucem reddire mavultis, vestros ad me ambasiatores mittatis, ipsis dicam quid illud sit quod facere vos oporteat; sin autem minime, et obstinate vultis contra stimulum calcitrare, mementote que dampna sitis et facinora perpetrati, meque expectetis summis cum viribus humanis et divinis, parem omnibus vicem relaturam.
  Datum Suliaci XXIIIa Martii Bohemis hereti(ci)s.
  Pasquerel.




Jésus, Marie


Depuis longtemps le bruit, la renommée m’est parvenue que, de vrais chrétiens que vous étiez, devenus hérétiques, et pareils aux Sarrazins, vous avez aboli la vraie religion et le culte, que vous avez adopté une superstition infecte et funeste, et que, dans votre zèle à la soutenir et à l’étendre, il n’est honte ni cruauté que vous n’osiez. Vous souillez les sacrements de l’Église, vous lacérez les articles de la foi, vous renversez les temples ; ces images qui furent faites pour de saintes commémorations, vous les brisez et les jetez au feu ; enfin, les chrétiens qui n’embrassent pas votre foi, vous les massacrez. Quelle fureur ou quelle folie, quelle rage vous agite ? Cette foi que le Dieu tout puissant, que le Fils, que le Saint-Esprit suscitèrent, instituèrent, exaltèrent, et que de mille manières, par mille miracles, ils illustrèrent, vous la persécutez, vous vous efforcez de la renverser et de l’exterminer. C’est vous, vous, qui êtes les aveugles et non ceux à qui manquent la vue et les yeux. Croyez-vous rester impunis ? Ignorez-vous que, si Dieu n’empêche pas vos violences impies, s’il souffre que vous soyez plongés plus longtemps dans les ténèbres et l’erreur, c’est qu’il vous prépare une peine et des supplices plus grands ? Quant à moi, pour vous dire la vérité, si je n’étais occupée aux guerres anglaises, je serais déjà allée vous trouver. Drais vraiment, si je n’apprends que vous vous êtes amendés, je quitterai peut-être les Anglais et je vous courrai sus, afin que j’extermine par le fer, si je ne le puis autrement, votre vaine et fougueuse superstition et que je vous ôte ou l’hérésie ou la vie. Toutefois, si vous préférez revenir à la foi catholique et à la primitive lumière, envoyez-moi vos ambassadeurs, je leur dirai ce que vous avez à faire. Si, au contraire, vous vous obstinez et voulez regimber sous l’éperon, souvenez-vous de tout ce que vous avez perpétré de forfaits et de crimes et attendez-vous à me voir venir avec toutes les forces divines et humaines pour vous rendre tout le mal que vous avez fait à autrui.

Donné à Sully, le 23 de mars, aux Bohêmes hérétiques.
 Pasquerel.
(
Anatole France: Vie de Jeanne d'Arc)