Tuesday 25 July 2023

Tuesday's Serial: “Le Fantôme de l'Opéra” by Gaston Leroux (in French) - XIV

 

XXI - DANS LES DESSOUS DE L'OPÉRA

La main haute, prête à tirer! répéta hâtivement le compagnon de Raoul. Derrière eux, le mur, continuant à faire un tour complet sur lui-même, s'était refermé.

Les deux hommes restèrent quelques instants immobiles, retenant leur respiration.

Dans ces ténèbres régnait un silence que rien ne venait troubler.

Enfin, le Persan se décida à faire un mouvement, et Raoul l'entendit qui glissait à genoux, cherchant quelque chose dans la nuit, de ses mains tâtonnantes.

Soudain, devant le jeune homme, les ténèbres s'éclairèrent prudemment au feu d'une petite lanterne sourde, et Raoul eut un recul instinctif comme pour échapper à l'investigation d'un secret ennemi. Mais il comprit aussitôt que ce feu appartenait au Persan, dont il suivait tous les gestes. Le petit disque rouge se promenait sur les parois, en haut, en bas, tout autour d'eux, méticuleusement. Ces parois étaient formées, à droite d'un mur, à gauche d'une cloison en planches, au-dessus et au-dessous des planchers. Et Raoul se disait que Christine avait passé par là le jour où elle avait suivi la voix de l'Ange de la musique. Ce devait être là le chemin accoutumé d'Erik quand il venait à travers les murs surprendre la bonne foi et intriguer l'innocence de Christine. Et Raoul qui se rappelait les propos du Persan, pensa que ce chemin avait été mystérieusement établi par les soins du Fantôme lui-même. Or, il devait apprendre plus tard qu'Erik avait trouvé là, tout préparé pour lui, un corridor secret dont longtemps il était resté le seul à connaître l'existence. Ce corridor avait été créé lors de la Commune de Paris pour permettre aux geôliers de conduire directement leurs prisonniers aux cachots que l'on avait construits dans les caves, car les fédérés avaient occupé le bâtiment aussitôt après le 18 mars et en avaient fait tout en haut un point de départ pour les montgolfières chargées d'aller porter dans les départements leurs proclamations incendiaires, et, tout en bas, une prison d'État.

Le Persan s'était mis à genoux et avait déposé par terre sa lanterne. Il semblait occupé à une rapide besogne dans le plancher et, tout à coup, il voila sa lumière.

Alors Raoul entendit un léger déclic et aperçut dans le plancher du corridor un carré lumineux très pâle. C'était comme si une fenêtre venait de s'ouvrir sur les dessous encore éclairés de l'Opéra. Raoul ne voyait plus le Persan, mais il le sentit soudain à ses côtés et il entendit son souffle.

—Suivez-moi, et faites tout ce que je ferai.

Raoul fut dirigé vers la lucarne lumineuse. Alors, il vit le Persan qui s'agenouillait encore et qui, se suspendant par les mains à la lucarne, se laissait glisser dans les dessous. Le Persan tenait alors son pistolet entre les dents.

Chose curieuse, le vicomte avait pleinement confiance dans le Persan. Malgré qu'il ignorât tout de lui, et que la plupart de ses propos n'eussent fait qu'augmenter l'obscurité de cette aventure, il n'hésitait point à croire que, dans cette heure décisive, le Persan était avec lui contre Erik. Son émotion lui avait paru sincère quand il lui avait parlé du «monstre»; l'intérêt qu'il lui avait montré ne lui semblait point suspect. Enfin, si le Persan avait nourri quelque sinistre projet contre Raoul, il n'eût pas armé celui-ci de ses propres mains. Et puis, pour tout dire, ne fallait-il point arriver coûte, que coûte, auprès de Christine? Raoul n'avait pas le choix des moyens. S'il avait hésité, même avec des doutes sur les intentions du Persan, le jeune homme se fût considéré comme le dernier des lâches.

Raoul, à son tour, s'agenouilla et se suspendit à la trappe, des deux mains. «Lâchez tout!» entendit-il, et il tomba dans les bras du Persan qui lui ordonna aussitôt de se jeter à plat ventre, referma au-dessus de leurs têtes la trappe, sans que Raoul pût voir par quel stratagème, et vint se coucher aux côtés du vicomte. Celui-ci voulut lui poser une question, mais la main du Persan s'appuya sur sa bouche et aussitôt il entendit une voix qu'il reconnut pour être celle du commissaire de police qui tout à l'heure l'avait interrogé.

Raoul et le Persan se trouvaient alors tous deux derrière un cloisonnement qui les dissimulait parfaitement. Près de là, un étroit escalier montait à une petite pièce, dans laquelle le commissaire devait se promener en posant des questions, car on entendait le bruit de ses pas en même temps que celui de sa voix.

La lumière qui entourait les objets était bien faible, mais, en sortant de cette obscurité épaisse qui régnait dans le couloir secret du haut, Raoul n'eut point de peine à distinguer la forme des choses.

Et il ne put retenir une sourde exclamation, car il y avait là trois cadavres.

Le premier était étendu sur l'étroit palier du petit escalier qui montait jusqu'à la porte derrière laquelle on entendait le commissaire; les deux autres avaient roulé au bas de cet escalier, les bras en croix. Raoul, en passant ses doigts à travers le cloisonnement qui le cachait, eût pu toucher la main de l'un de ces malheureux.

—Silence! fit encore le Persan dans un souffle.

Lui aussi avait vu les corps étendus et il eut un mot pour tout expliquer:

—Lui!

La voix du commissaire se faisait alors entendre avec plus d'éclat. Il réclamait des explications sur le système d'éclairage, que le régisseur lui donnait. Le commissaire devait donc se trouver dans le «jeu d'orgue» ou dans ses dépendances. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, surtout quand il s'agit d'un théâtre d'opéra, le «jeu d'orgue» n'est nullement destiné à faire de la musique.

À cette époque, l'électricité n'était employée que pour certains effets scéniques très restreints et pour les sonneries. L'immense bâtiment et la scène elle-même étaient encore éclairés au gaz et c'était toujours avec le gaz hydrogène qu'on réglait et modifiait l'éclairage d'un décor, et cela au moyen d'un appareil spécial auquel la multiplicité de ses tuyaux a fait donner le nom de «jeu d'orgue».

Une niche était réservée à côté du trou du souffleur, au chef d'éclairage, qui, de là, donnait ses ordres à ses employés et en surveillait l'exécution. C'est dans cette niche que, à toutes les représentations, se tenait Mauclair.

Or, Mauclair n'était point dans sa niche et ses employés m'étaient point à leur place.

—Mauclair! Mauclair!

La voix du régisseur résonnait maintenant dans les dessous comme dans un tambour. Mais Mauclair ne répondait pas:

Nous avons dit qu'une porte ouvrait sur un petit escalier qui montait du deuxième dessous. Le commissaire la poussa, mais elle résista: «Tiens! Tiens! fit-il... Voyez donc, monsieur le régisseur, je ne peux pas ouvrir cette porte... est-elle toujours aussi difficile?»

Le régisseur, d'un vigoureux coup d'épaule, poussa la porte. Il s'aperçut qu'il poussait en même temps un corps humain et ne put retenir une exclamation: ce corps, il le reconnut tout de suite:

—Mauclair!

Tous les personnages qui avaient suivi le commissaire dans cette visite au jeu d'orgue s'avancèrent, inquiets.

—Le malheureux! Il est mort, gémit le régisseur.

Mais M. le commissaire Mifroid, que rien ne surprend, était déjà penché sur ce grand corps.

—Non, fit-il, il est ivre-mort! ça n'est pas la même chose.

—Ce serait la première fois, déclara le régisseur.

—Alors, on lui a fait prendre un narcotique... C'est bien possible.

Mifroid se releva, descendit encore quelques marches et s'écria:

—Regardez!

À la lueur d'un petit fanal rouge, au bas de l'escalier, deux autres corps étaient étendus. Le régisseur reconnut les aides de Mauclair... Mifroid descendit, les ausculta.

—Ils dorment profondément, dit-il. Très curieuse affaire! Nous ne pouvons plus douter de l'intervention d'un inconnu dans le service de l'éclairage... et cet inconnu travaillait évidemment pour le ravisseur!... Mais quelle drôle d'idée de ravir une artiste en scène!... C'est jouer la difficulté, cela, ou je ne m'y connais pas! Qu'on aille me chercher le médecin du théâtre.

Et M. Mifroid répéta:

—Curieuse! très curieuse affaire!

Puis il se tourna vers l'intérieur de la petite pièce, s'adressant à des personnes que, de l'endroit où ils se trouvaient, ni Raoul ni le Persan ne pouvaient apercevoir.

—Que dites-vous de tout ceci, messieurs? demanda-t-il. Il n'y a que vous qui ne donnez point votre avis. Vous devez bien avoir cependant une petite opinion...

Alors, au-dessus du palier, Raoul et le Persan virent s'avancer les deux figures effarées de MM. les directeurs,—on ne voyait que leurs figures au-dessus du palier—et ils entendirent la voix émue de Moncharmin:

—Il se passe ici, monsieur le commissaire, des choses que nous ne pouvons nous expliquer.

Et les deux figures disparurent.

—Merci du renseignement, messieurs, fit Mifroid, goguenard.

—Mais le régisseur, dont le menton reposait alors dans le creux de la main droite, ce qui est le geste de la réflexion profonde, dit:

—Ce n'est point la première fois que Mauclair s'endort au théâtre. Je me rappelle l'avoir trouvé un soir, ronflant dans sa petite niche, à côté de sa tabatière.

—Il y a longtemps de cela? demanda M. Mifroid, en essuyant avec un soin méticuleux les verres de son lorgnon, car, M. le commissaire était myope, ainsi qu'il arrive aux plus beaux yeux du monde.

—Mon Dieu!... fit le régisseur... non, il n'y a pas bien longtemps... Tenez!... C'était le soir... Ma foi oui... c'était le soir où la Carlotta, vous savez bien, monsieur le commissaire, a lancé son fameux couac!...

—Vraiment, le soir où la Carlotta a lancé son fameux couac?

Et M. Mifroid ayant remis sur son nez le binocle aux glaces transparentes, fixa attentivement le régisseur, comme s'il voulait pénétrer sa pensée.

—Mauclair prise donc?... demanda-t-il d'un ton négligent.

—Mais oui, monsieur le commissaire... Tenez, voici justement sur cette planchette sa tabatière... Oh! c'est un grand priseur.

—Et moi aussi! fit M. Mifroid, et il mit la tabatière dans sa poche.

Raoul et le Persan assistèrent, sans que nul ne soupçonnât leur présence, au transport des trois corps que des machinistes vinrent enlever. Le commissaire les suivit et tout le monde derrière lui, remonta. On entendit, quelques instants encore, leurs pas qui résonnaient sur le plateau.

Quand ils furent seuls, le Persan fit signe a Raoul de se soulever. Celui-ci obéit; mais comme, en même temps, il n'avait point replacé la main haute devant les yeux, prête à tirer, ainsi que le Persan ne manquait pas de le faire, celui-ci lui recommanda de prendre à nouveau cette position et de ne point s'en départir, quoi qu'il arrivât.

—Mais cela fatigue la main inutilement! murmura Raoul, et si je tire, je ne serai plus sûr de moi!

—Changez votre arme de main, alors! concéda le Persan.

—Je ne sais pas tirer de la main gauche!

À quoi le Persan répondit par cette déclaration bizarre, qui n'était point faite évidemment pour éclaircir la situation dans le cerveau bouleversé du jeune homme:

—Il ne s'agit point de tirer de la main gauche ou de la main droite; il s'agit d'avoir l'une de vos mains placée comme si elle allait faire jouer la gâchette d'un pistolet, le bras étant à demi replié; quant au pistolet en lui-même, après tout, vous pouvez le mettre dans votre poche.

Et il ajouta:

—Que ceci soit entendu, ou je ne réponds plus de rien! C'est une question de vie ou de mort. Maintenant, silence et suivez-moi!

Ils se trouvaient alors dans le deuxième dessous; Raoul ne faisait qu'entrevoir à la lueur de quelques lumignons immobiles, ça et là, dans leurs prisons de verre, une infime partie de cet abîme extravagant, sublime et enfantin, amusant comme une boîte de Guignol, effrayant comme un gouffre, que sont les dessous de la scène à l'Opéra.

Ils sont formidables et au nombre de cinq. Ils reproduisent tous les plans de la scène, ses trappes et ses trappillons. Les costières seules y sont remplacées par des rails. Des charpentes transversales supportent trappes et trappillons. Des poteaux, reposant sur des dés de fonte ou de pierre, de sablières ou «chapeaux de forme», forment des séries de fermes qui permettent de laisser un libre passage aux «gloires» et autres combinaisons ou trucs. On donne à ces appareils une certaine stabilité en les reliant au moyen de crochets de fer et suivant les besoins du moment. Les treuils, les tambours, les contrepoids sont généreusement distribués dans les dessous. Ils servent à manœuvrer les grands décors, à opérer les changements à vue, à provoquer la disparition subite des personnages de féerie. C'est des dessous, ont dit MM. X., Y., Z., qui ont consacré à l'œuvre de Garnier une étude si intéressante, c'est des dessous qu'on transforme les cacochymes en beaux cavaliers, les sorcières hideuses en fées radieuses de jeunesse. Satan vient des dessous, de même qu'il s'y enfonce. Les lumières de l'enfer s'en échappent, les chœurs des démons y. prennent place.

... Et les fantômes s'y promènent comme chez eux...

Raoul suivait le Persan, obéissant à la lettre à ses recommandations, n'essayant point de comprendre les gestes qu'il lui ordonnait... se disant qu'il n'avait plus d'espoir qu'en lui.

... Qu'eût-il fait sans son compagnon dans cet effarant dédale?

N'eût-il point été arrêté à chaque pas, par l'entrecroisement prodigieux des poutres et des cordages? Ne se serait-il point pris, à ne pouvoir s'en dépêtrer, dans cette toile d'araignée gigantesque?

Et s'il avait pu passer à travers ce réseau de fils et de contrepoids sans cesse renaissant devant lui, ne courait-il point le risque de tomber dans l'un de ces trous qui s'ouvraient par instants sous ses pas et dont l'œil n'apercevait point le fond de ténèbres!

... Ils descendaient... Ils descendaient encore...

Maintenant, ils étaient dans le troisième dessous.

Et leur marche était toujours éclairée par quelque lumignon lointain.

Plus l'on descendait et plus le Persan semblait prendre de précautions... Il ne cessait de se retourner vers Raoul et de lui recommander de se tenir comme il le fallait, en lui montrant la façon dont il tenait lui-même son poing, maintenant désarmé, mais toujours prêt à tirer comme s'il avait eu un pistolet.

Tout à coup une voix retentissante les cloua sur place. Quelqu'un, au-dessus d'eux, hurlait.

—Sur le plateau tous les «fermeurs de portes!» Le commissaire de police les demande?

... On entendit des pas, et des ombres glissèrent dans l'ombre. Le Persan avait attiré Raoul derrière un portant... Ils virent passer près d'eux, au-dessus d'eux, des vieillards courbés par les ans et le fardeau ancien des décors d'opéra. Certains pouvaient à peine se traîner...; d'autres, par habitude, l'échine basse et les mains en avant, cherchaient des portes à fermer.

Car c'était les fermeurs de portes... les anciens machinistes épuisés et dont une charitable direction avait eu pitié... Elle les avait faits fermeurs de portes dans les dessous, dans les dessus. Ils allaient et venaient sans cesse du haut en bas de la scène pour fermer les portes—et ils étaient aussi appelés en ce temps-là, car depuis, je crois bien qu'ils sont tous morts: «les chasseurs de courants d'air».

Les courants d'air, d'où qu'ils viennent, sont très mauvais pour la voix[3].

Le Persan et Raoul se félicitèrent en a parte de cet incident qui les débarrassait de témoins gênants, car quelques-uns des fermeurs de portes, n'ayant plus rien à faire et n'ayant guère de domicile, restaient par paresse ou par besoin, à l'Opéra, où ils passaient la nuit. On pouvait heurter à eux, les réveiller, s'attirer une demande d'explications. L'enquête de M. Mifroid gardait momentanément nos deux compagnons de ces mauvaises rencontres.

Mais ils ne furent point longtemps à jouir de leur solitude... D'autres ombres, maintenant, descendaient le même chemin par où les «fermeurs de portes» avaient monté. Ces ombres avaient chacune devant elle une petite lanterne... qu'elles agitaient fort, la portant en haut, en bas, examinant tout autour d'elles et semblant, de toute évidence, chercher quelque chose ou quelqu'un.

Diable! murmura le Persan... je ne sais pas ce qu'ils cherchent, mais ils pourraient bien nous trouver... fuyons!... vite!... La main en garde, monsieur, toujours prête à tirer!... Ployons le bras, davantage, là!... la main à hauteur de l'œil, comme si vous vous battiez en duel et que vous attendiez le commandant de «feu!...» Laissez donc votre pistolet dans votre poche!... Vite, descendons! (Il entraînait Raoul dans le quatrième dessous)... à hauteur de l'œil question de vie ou de mort!... Là, par ici, cet escalier! (ils arrivaient au cinquième dessous)... Ah! quel duel, monsieur, quel duel!...

Le Persan étant arrivé en bas du cinquième dessous, souffla... Il paraissait jouir d'un peu plus de sécurité qu'il n'en avait montré tout à l'heure quand tous deux s'étaient arrêtés au troisième, mais cependant il ne se départissait pas de l'attitude de la main!...

Raoul eut le temps de s'étonner une fois de plus—sans, du reste, faire aucune nouvelle observation, aucune! car en vérité, ce n'était pas le moment—de s'étonner, dis-je, en silence, de cette extraordinaire conception de la défense personnelle qui consistait à garder son pistolet dans sa poche pendant que la main restait toute prête à s'en servir comme si le pistolet était encore dans la main, à hauteur de l'œil; position d'attente du commandant de «feu!» dans le duel de cette époque.

Et, à ce propos Raoul croyait pouvoir penser encore ceci: «Je me rappelle fort bien qu'il m'a dit: «Ce sont des pistolets dont je suis sûr».

D'où il lui semblait logique de tirer cette conclusion interrogative: «Qu'est-ce que ça peut bien lui faire d'être sûr d'un pistolet dont il trouve inutile de se servir?»

Mais le Persan l'arrêta dans ses vagues essais de cogitation. Lui faisant signe de se tenir en place, il remonta de quelques degrés l'escalier qu'ils venaient de quitter. Puis rapidement, il revint auprès de Raoul.

—Nous sommes stupides, lui souffla-t-il, nous allons être bientôt débarrassés des ombres aux lanternes... Ce sont les pompiers qui font leur ronde[4].

Les deux hommes restèrent alors sur la défensive pendant au moins cinq longues minutes, puis le Persan entraîna à nouveau Raoul vers l'escalier qu'ils venaient de descendre; mais, tout à coup, son geste lui ordonna à nouveau l'immobilité.

... Devant eux, la nuit remuait.

—À plat ventre! souffla le Persan!

—Les deux hommes s'allongèrent sur le sol.

Il n'était que temps.

... Une ombre qui ne portait cette fois aucune lanterne, ...une ombre simplement dans l'ombre passait.

Elle passa près d'eux à les toucher.

Ils sentirent, sur leurs visages, le souffle chaud de son manteau...

Car ils purent suffisamment la distinguer pour voir que l'ombre avait un manteau qui l'enveloppait de la tête aux pieds. Sur la tête, un chapeau de feutre mou.

... Elle s'éloigna, rasant les murs du pied et quelquefois, donnant, dans les coins, des coups de pied aux murs.

—Ouf! fit le Persan... nous l'avons échappé belle... Cette ombre me connaît et m'a déjà ramené deux fois dans le bureau directorial.

—C'est quelqu'un de la police du théâtre? demanda Raoul.

—C'est quelqu'un de bien pis! répondit sans autre explication le Persan[5].

—Ce n'est pas.... lui?

—Lui?... s'il n'arrive pas par derrière, nous verrons toujours ses yeux d'or!... C'est un peu notre force dans la nuit. Mais il peut arriver par derrière... à pas de loup... et nous sommes morts si nous ne tenons pas toujours nos mains comme si elles allaient tirer, à hauteur de l'œil, par devant!

Le Persan n'avait pas fini de formuler à nouveau cette «ligne d'attitude» que, devant les deux hommes, une figure fantastique apparut.

... Une figure tout entière... un visage; non point seulement deux yeux d'or.

... Mais tout un visage lumineux... toute une figure en feu!

Oui, une figure en feu qui s'avançait à hauteur d'homme, mais sans corps!

Cette figure dégageait du feu.

Elle paraissait, dans la nuit, comme une flamme à forme de figure d'homme.

—Oh! fit le Persan dans ses dents, c'est la première fois que je la vois!... Le lieutenant de pompiers n'était pas fou! Il l'avait bien vue, lui!... Qu'est-ce que c'est que cette flamme-là? Ce n'est pas lui! mais c'est peut-être lui qui nous l'envoie!... Attention!... Attention!... Votre main à hauteur de l'œil, au nom du ciel!... à hauteur de l'œil!

La figure en feu, qui paraissait une figure d'enfer—de démon embrasé—s'avançait toujours à hauteur d'homme, saris corps, au-devant des deux hommes effarés...

—Il nous envoie peut-être cette figure-là par devant, pour mieux nous surprendre par derrière... ou sur les côtés... on ne sait jamais avec lui!... Je connais beaucoup de ses trucs!... mais celui-là!... celui-là!... je ne le connais pas encore!... Fuyons!... par prudence!... n'est-ce pas?... par prudence!... la main à hauteur de l'œil..

Et ils s'enfuirent, tous les deux, tout au long du long corridor souterrain qui s'ouvrait devant eux.

Au bout de quelques secondes de cette course, qui leur parut de longues, longues minutes, ils s'arrêtèrent.

—Pourtant, dit le Persan, il vient rarement par ici! Ce côté-ci ne le regarde pas!... Ce côté-ci ne conduit pas au Lac ni à la demeure du Lac!... Mais il sait peut-être que nous sommes à ses trousses!... bien que je lui aie promis de le laisser tranquille désormais et de ne plus m'occuper de ses histoires.

Ce disant, il tourna la tête, et Raoul aussi tourna la tête.

Or, ils aperçurent encore la tête en feu derrière leurs deux têtes. Elle les avait suivis... Et elle avait dû courir aussi et peut-être plus vite qu'eux, car il leur parut qu'elle s'était rapprochée.

En même temps, ils commencèrent à distinguer un certain bruit dont il leur était impossible de deviner la nature; ils se rendirent simplement compte que ce bruit semblait se déplacer et se rapprocher avec la flamme-figure-d'homme. C'étaient des grincements ou plutôt crissements, comme si des milliers d'ongles se fussent éraillés au tableau noir, bruit effroyablement insupportable qui est encore produit quelquefois par une petite pierre à l'intérieur du bâton de craie qui vient grincer contre le tableau noir.

Ils reculèrent encore, mais la figure-flamme avançait, avançait toujours, gagnant sur eux. On pouvait voir très bien ses traits maintenant, Les yeux étaient tout ronds et fixes, le nez un peu de travers et la bouche grande avec une lèvre inférieure en demi-cercle, pendante; à peu près comme les yeux, le nez et la lèvre de la lune, quand la lune est toute rouge, couleur de sang.

Comment cette lune rouge glissait-elle dans les ténèbres, à hauteur d'homme sans point d'appui, sans corps pour la supporter, du moins apparemment? Et comment allait-elle si vite, tout droit, avec ses yeux fixes, si fixes? Et tout ce grincement, craquement, crissement qu'elle traînait avec elle, d'où venait-il?

À un moment, le Persan et Raoul ne purent plus reculer et ils s'aplatirent contre la muraille, ne sachant ce qu'il allait advenir d'eux à cause de cette figure incompréhensible de feu et surtout, maintenant, du bruit plus, intense, plus grouillant, plus vivant, très «nombreux», car certainement ce bruit était fait de centaines de petits bruits qui remuaient dans les ténèbres, sous la tête-flamme.

Elle avance, la tête-flamme... la voilà!... avec son bruit!... la voilà à hauteur!...

Et les deux compagnons, aplatis contre la muraille, sentent leurs cheveux se dresser d'horreur sur leurs têtes, car il savent maintenant d'où viennent les mille bruits. Ils viennent en troupe, roulés dans l'ombre par d'innombrables petits flots pressés, plus rapides que les flots qui trottent sur le sable, à la marée montante, des petits flots de nuit qui moutonnent sous la lune, sous la lune-tête-flamme.

Et les petits flots leur passent dans les jambes, leur montent dans les jambes, irrésistiblement. Alors, Raoul et le Persan ne peuvent plus retenir leurs cris d'horreur, d'épouvante et de douleur.

Ils ne peuvent plus, non plus, continuer de tenir leurs mains à hauteur de l'œil,—tenue du duel au pistolet à cette époque, avant le commandement de: «Feu!»—Leurs mains descendent à leurs jambes pour repousser les petits îlots luisants, et qui roulent des petites choses aiguës, des flots qui sont pleins de pattes, et d'ongles, et de griffes, et de dents.

Oui, oui, Raoul et le Persan sont prêts à s'évanouir comme le lieutenant de pompiers Papin. Mais la tête-feu s'est retournée vers eux à leur hurlement. Et elle leur parle:

—Ne bougez pas! Ne bougez pas!... Surtout, ne me suivez pas!... C'est moi le tueur de rats!... Laissez-moi passer avec mes rats!...

Et brusquement, la tête-feu disparaît, évanouie dans les ténèbres, cependant que devant elle le couloir, au loin s'éclaire, simple résultat de la manœuvre que le tueur de rats vient de faire subir à sa lanterne sourde. Tout à l'heure, pour ne point effaroucher les rats devant lui, il avait tourné sa lanterne sourde sur lui-même, illuminant sa propre tête; maintenant pour hâter sa fuite, il éclaire l'espace noir devant elle... Alors il bondit, entraînant avec lui tous les flots de rats, grimpants, crissants, tous les mille bruits...

Le Persan et Raoul, libérés, respirent, quoique tremblants encore.

—J'aurais dû me rappeler qu'Erik m'avait parlé du tueur de rats, fit le Persan, mais il ne m'avait pas dit qu'il se présentait sous cet aspect... et c'est bizarre que je ne l'aie jamais rencontré[6].

Ah! j'ai bien cru que c'était encore là l'un des tours du monstre!... soupira-t-il... Mais non! Il ne vient jamais dans ces parages!

—Nous sommes donc bien loin du lac? interrogea Raoul. Quand donc arriverons-nous, monsieur?... Allons au lac! Allons au lac!... Quand nous serons au lac nous appellerons, nous secouerons les murs, nous crierons!... Christine nous entendra!... Et Lui aussi nous entendra!... Et puisque vous le connaissez, nous lui parlerons!

—Enfant! fit le Persan... Nous n'entrerons jamais dans le demeure du Lac par le Lac!

—Pourquoi cela?

—Parce que c'est là qu'il a accumulé toute sa défense... Moi-même je n'ai jamais pu aborder sur l'autre rive!... sur la rive de la maison!... Il faut traverser le lac d'abord... et il est bien gardé!... Je crains que plus d'un de ceux—anciens machinistes, vieux fermeurs de portes,—que l'on n'a jamais revus, n'aient simplement tenté de traverser le lac... C'est terrible... J'ai failli moi-même y rester... Si le monstre ne m'avait reconnu à temps!.... Un conseil, monsieur, n'approchez jamais du Lac... Et surtout, bouchez-vous les oreilles si vous entendez chanter la Voix sous Veau, la voix de la Sirène.

—Mais alors, reprit Raoul dans un transport de fièvre, d'impatience et de rage, que faisons-nous ici?... Si vous ne pouvez rien pour Christine, laissez-moi au moins mourir pour elle.

Le Persan essaya de calmer le jeune homme.

—Nous n'avons qu'un moyen de sauver Christine Daaé, croyez-moi, c'est de pénétrer dans cette demeure sans que le monstre s'en aperçoive.

—Nous pouvons espérer cela, monsieur?

—Eh! si je n'avais pas cet espoir-là, je ne serais pas venu vous chercher!

—Et par où peut-on entrer dans la demeure du Lac, sans passer par le Lac?

—Par le troisième dessous, d'où nous avons été si malencontreusement chassés... monsieur, et où nous allons retourner de ce pas... Je vais vous dire, monsieur, fit le Persan, la voix soudain altérée... je vais vous dire l'endroit exact... Cela se trouve entre une ferme et un décor abandonné du Roi de Lahore, exactement, exactement à l'endroit où est mort Joseph Buquet...

—Ah! ce chef machiniste que l'on a trouvé pendu?

—Oui, monsieur, ajouta sur un singulier ton le Persan, et dont on n'a pu retrouver la corde!... Allons! du courage... et en route!... et remettez votre main en garde, monsieur... Mais où sommes-nous donc?

Le Persan dut allumer à nouveau sa lanterne sourde. Il en dirigea le jet lumineux sur deux vastes corridors qui se croisaient à angle droit et dont les voûtes se perdaient à l'infini.

—Nous devons être, dit-il, dans la partie réservée plus particulièrement au service des eaux... Je n'aperçois aucun feu venant des calorifères.

Il précéda Raoul, cherchant son chemin, s'arrêtant brusquement quand il redoutait le passage de quelque hydraulicien, puis ils eurent à se garer de la lueur d'une sorte de forge souterraine que l'on finissait d'éteindre et devant laquelle Raoul reconnut les démons entr'aperçus par Christine lors de son premier voyage au jour de sa première captivité.

Ainsi, ils revenaient peu à peu jusque sous les prodigieux dessous de la scène.

Ils devaient être alors tout au fond de la cuve, à une très grande profondeur, si l'on songe que l'on a creusé la terre à quinze mètres au-dessous des couches d'eau qui existaient dans toute cette partie de la capitale; et l'on dut épuiser toute l'eau... On en retira tant que, pour se faire une idée de la masse d'eau expulsée par les pompes, il faudrait se représenter en surface la cour du Louvre et en hauteur une fois et demie les tours de Notre-Dame. Tout de même, il fallut garder un lac.

À ce moment, le Persan toucha une paroi et dit:

—Si je ne me trompe, voici un mur qui pourrait bien appartenir à la demeure du lac!

Il frappait alors contre une paroi de la cuve. Et peut-être n'est-il point inutile que le lecteur sache comment avaient été construits le fond et les parois de la cuve.

Afin d'éviter que les eaux qui entourent la construction ne restassent en contact immédiat avec les murs soutenant tout rétablissement de la machinerie théâtrale dont l'ensemble de charpentes, de menuiserie, de serrurerie, de toiles peintes à la détrempe doit être tout spécialement préservé de l'humidité, l'architecte s'est vu dans la nécessité d'établir partout une double enveloppe.

Le travail de cette double enveloppe demanda toute une année. C'est contre le mur de la première enveloppe intérieure que frappait le Persan en parlant à Raoul de la demeure du Lac. Pour quelqu'un qui eût connu l'architecture du monument, le geste du Persan semblait indiquer que la mystérieuse maison d'Erik avait été construite dans la double enveloppe, formée d'un gros mur construit en batardeau, puis par un mur de briques, une énorme couche de ciment et un autre mur de plusieurs mètres d'épaisseur.

Aux paroles du Persan, Raoul s'était jeté contre la paroi, et avidement avait écouté.

... Mais il n'entendit rien... rien que des pas lointains qui résonnaient sur le plancher dans les parties hautes du théâtre.

Le Persan avait à nouveau éteint sa lanterne.

—Attention! fit-il... gare à la main! et maintenant silence! car nous allons essayer encore de pénétrer chez lui.

Et il l'entraîna jusqu'au petit escalier que tout à l'heure ils avaient descendu.

... Ils remontèrent, s'arrêtant à chaque marche, épiant l'ombre et le silence...

Ainsi se retrouvèrent-ils au troisième dessous...

Le Persan fit alors signe à Raoul de se mettre à genoux, et c'est ainsi, en se traînant sur les genoux et sur une main—l'autre main étant toujours dans la position indiquée—qu'ils arrivèrent contre la paroi du fond.

Contre cette paroi, il y avait une vaste toile abandonnée du décor du Roi de Lahore.

... Et, tout près de ce décor, un portant...

Entre ce décor et ce portant, il y avait tout juste la place d'un corps.

... Un corps, qu'un jour on avait trouvé pendu... le corps de Joseph Buquet.

Le Persan, toujours sur ses genoux, s'était arrêté. Il écoutait.

Un moment, il sembla hésiter et regarda Raoul, puis ses yeux se fixèrent au-dessus, vers le deuxième dessous, qui leur envoyait la faible lueur d'une lanterne, dans l'intervalle de deux planches.

Évidemment, cette lueur gênait le Persan.

Enfin, il hocha la tête et se décida.

Il se glissa entre le portant et le décor du Roi de Lahore.

Raoul était sur ses talons.

La main libre du Persan tâtait la paroi. Raoul le vit un instant appuyer fortement sur la paroi comme il avait appuyé sur le mur de la logé de Christine...

... Et une pierre bascula...

Il y avait maintenant un trou dans la paroi...

Le Persan sortit cette fois son pistolet de sa poche et indiqua à Raoul qu'il devait l'imiter. Il arma le pistolet.

Et résolument, toujours à genoux il s'engagea dans le trou que la pierre, en basculant, avait fait dans le mur.

Raoul, qui avait voulu passer le premier, dut se contenter de le suivre.

Ce trou était fort étroit. Le Persan s'arrêta presque tout de suite. Raoul l'entendait tâter la pierre autour de lui. Et puis, il sortit encore sa lanterne sourde et se pencha en avant, examina quelque, chose sous lui et éteignit aussitôt la lanterne. Raoul l'entendit qui lui disait dans un souffle:

—Il va falloir nous laisser tomber de quelques mètres, sans bruit; défaites vos bottines.

Le Persan procédait déjà lui-même à cette opération. Il passa ses chaussures à Raoul.

—Déposez-les, fit-il, au delà du mur... Nous les retrouverons en sortant[7].

Sur ce, le Persan avança un peu. Puis, il se retourna tout à fait, toujours à genoux et se trouva ainsi tête à tête avec Raoul. Il lui dit:

—Je vais me suspendre par les mains à l'extrémité de la pierre et me laisser tomber dans sa maison. Ensuite, vous ferez exactement comme moi. N'ayez crainte: je vous recevrai dans mes bras.

—Le Persan fit comme il le disait; et, au-dessous de lui, Raoul entendit bientôt un bruit sourd qui était produit évidemment par la chute du Persan. Le jeune homme tressaillit dans la crainte que ce bruit ne révélât leur présence.

Cependant, plus que ce bruit, l'absence de tout autre bruit était pour Raoul un affreux sujet d'angoisse. Comment! d'après le Persan, ils venaient de pénétrer dans les murs mêmes de la demeure du Lac, et l'on n'entendait point Christine!... Pas un cri!... Pas un appel!... Pas un gémissement!... Grands dieux! arriveraient-ils trop tard?...

Raclant, de ses genoux, la muraille, s'accrochant à la pierre de ses doigts nerveux, Raoul, à son tour, se laissa tomber.

Et aussitôt il sentit une étreinte.

—C'est moi! fit le Persan, silence!

Et ils restèrent immobiles, écoutant...

Jamais, autour d'eux, la nuit n'avait été plus opaque...

Jamais le silence plus pesant ni plus terrible...

Raoul s'enfonçait les ongles dans les lèvres pour ne pas hurler: «Christine! C'est moi!... Réponds-moi si tu n'es pas morte, Christine?»

Enfin, le jeu de la lanterne sourde recommença. Le Persan en dirigea les rayons au-dessus de leurs têtes, contre la muraille, cherchant le trou par lequel ils étaient venus et ne le trouvant plus...

—Oh! fit-il... la pierre s'est refermée d'elle-même.

Et le jet lumineux de la lanterne descendit le long du mur, puis jusqu'au parquet.

Le Persan se baissa et ramassa quelque chose, une sorte de fil qu'il examina une seconde et rejeta avec horreur.

—Le fil du Pendjab! murmura-t-il.

—Qu'est-ce? demanda Raoul.

—Ça, répondit le Persan en frissonnant, ça pourrait bien être la corde du pendu que l'on a tant cherchée!...

Et, subitement pris d'une anxiété nouvelle, il promena le petit disque rouge de sa lanterne sur les murs... Ainsi il éclaira, événement bizarre, un tronc d'arbre qui semblait encore tout vivant avec ses feuilles... et les branches de cet arbre montaient tout le long de la muraille et allaient se perdre dans le plafond.

À cause de la petitesse du disque lumineux, il était difficile d'abord de se rendre compte des choses... on voyait un coin de branches... et puis une feuille... et une autre... et à côté, on ne voyait rien du tout... rien que le jet lumineux qui semblait se refléter lui-même... Raoul glissa sa main sur ce rien du tout, sur ce reflet...

—Tiens! fit-il... le mur, c'est une glace!

—Oui! une glace! dit le Persan, sur le ton de l'émotion la plus profonde. Et il ajouta, en passant sa main qui tenait le pistolet sur son front en sueur:

—Nous sommes tombés dans la chambre des supplices!

 

[3]M. Pedro Gailhard m'a raconté lui-même qu'il avait encore créé des postes de fermeurs de portes pour de vieux machinistes, qu'il ne voulait pas lui-même mettre à la porte.

[4]À cette époque, les pompiers avaient encore mission, en dehors des représentations, de veiller à la sécurité de l'Opéra; mais ce service, depuis, a été supprimé. Comme j'en demandais la raison à M. Pedro Gailhard, il me répondit que «c'était parce qu'on avait craint que dans leur inexpérience parfaite des dessous du théâtre, ils n'y missent le feu».

[5]L'auteur, pas plus que le Persan, ne donnera d'autre explication sur cette apparition d'ombre-là. Alors que tout dans cette histoire historique sera normalement au cours d'événements quelquefois apparemment anormaux, expliqué, l'auteur ne fera point comprendre expressément au lecteur ce que le Persan a voulu dire par ces mots: C'est quelqu'un de bien pis! (que quelqu'un de la police du théâtre). Le lecteur devra le deviner, car l'auteur a promis à l'ex-directeur de l'Opéra, M. Pedro Gailhard, de lui garder le secret sur la personnalité extrêmement intéressante et utile de l'ombre errante au manteau qui, tout en se condamnant à vivre dans les dessous du théâtre, a rendu de si prodigieux services à ceux qui, les soirs de gala, par exemple, osent se risquer dans les dessus. Je parle ici de services d'État, et je ne puis en dire plus long, ma parole.

[6]L'ancien directeur de l'Opéra, M. Pedro Gailhard, m'a conté un jour au cap d'Ail, chez Mme Pierre Wolff, toute l'immense déprédation souterraine due au ravage des rats, jusqu'au jour où l'administration traita, pour un prix assez élevé du reste, avec un individu qui se faisait fort de supprimer le fléau en venant faire un tour dans les caves tous les quinze jours.

Depuis, il n'y a plus de rats à l'Opéra, que ceux qui sont admis au foyer de la danse. M. Gailhard pensait que cet homme avait découvert un parfum secret qui attirait à lui les rats comme le «coq-levent» dont certains pêcheurs se garnissent les jambes attire le poisson. Il les entraînait, sur ses pas, dans quelque caveau, où les rats, enivrés, se laissaient noyer. Nous avons vu l'épouvante que l'apparition de cette figure avait déjà causée au lieutenant de pompiers, épouvante qui était allée jusqu'à l'évanouissement—conversation avec M. Gailhard—et, pour moi, il ne fait point de doute que la tête-flamme rencontrée par ce pompier soit la même qui mit dans un si cruel émoi le Persan et le vicomte de Chagny (papiers du Persan).

[7]On n'a jamais retrouvé ces deux paires de bottines qui avaient été déposées, d'après les papiers du Persan, juste entre le portant et le décor du Roi de Lahore, à l'endroit où l'on avait trouvé Joseph Briquet pendu. Elles ont dû être prises par quelque machiniste ou «fermeur de portes».

Saturday 22 July 2023

Good Reading: "The Tailor and the Talking Animals" by Ludwig Bechstein (translated into English)

 

A shoemaker and a tailor were wandering together. The shoemaker had some money; the tailor had none. Both were in love with the same girl, Lizzie, and both had in mind to marry her after he had made enough money for it and had become masters of their crafts. The shoemaker was wicked, while the tailor was good-natured and frivolous.

The tailor had not really want to wander with the shoemaker, since he himself was moneyless, but the shoemaker had said, "Come along with me. I have some money, so we may eat and drink every day, also when we do not get any work."

What the tailor did not know, was that the shoemaker had invited him to wander with him to do something evil against him, for by the way Lizzie looked at the tailor the shoemaker had found out she liked the tailor best. So the tailor had accepted the offer, and both had packed up their knapsacks and set off together.

They wandered for nine days. The tailor was offered work to do several times, but Peter was not. He persuaded the tailor not to accept the work but instead walk on with him. However, after these nine days the shoemaker said to the tailor, "Hans, my money is dwindling. It will still last a while, but from now on we may eat and drink only two times daily."

"Ah, a shortage of food and drink this early!" sighed the tailor. "I should not have come with you. I could have starved at home instead."

The shoemaker had money enough and had his fill of food every day, for when he bought their food, he ate then too, secretly. When he came back to Hans he had two more meals with him, and listened to his companion's complaints of being hungry, and his growling stomack.

Nine more days passed, and they did not find any work during this time. The shoemaker said, ""Hans, from now on there will be food only once a day."

"Oh, oh, Peter," said Hans to the shoemaker, "I am already so thin that I almost barely cast a shadow."

"Buckle your belt a little more!" the shoemaker said laughingly. "See, there is food where we go: berries and roots abound in this season."

Hans ate berries that he knew, but he did not get any stouter. He did not get any work offers any longer either, for master tailors thought that such a bony and thin fellow might not be good enough for their work, and said so in inconsiderate ways too."

The tailor wept when he did not get any work, while the shoemaker secretly took malicious pleasure in it. After nine more days he said, "Hans, There is no more food money for the two of us."

The tailor cried, "Woe that I went out in the world with you! If only you had never persuaded me to come with you, time after time."

The shoemaker said with a grim laugh, "But there is much to drink around us - Water, water!" Water can be healthy when you are thirsty, and I drink water too."

"But water is not food!" the tailor complained.

"Well, I will go to the bakery and for the last money I have got I will buy soemthing for us," said the shoemaker. He left Hans sitting on a stone and went to a bakery, bought four sandwiches, ate three and drank gin along with it. Then he went back to Hans.

"Peter, you smell of booze!" said the tailor to the shoemaker.

"So? Well, here is your half bread."

The starving tailor ate his half with water and then walked on with his secrely plotting companion. They said almost nothing to each other.

Towards evening they walked into a village. The shoemaker went to a bakery, ate his fill and came back to the tailor with a bread in his hand. The tailor thought he would share the bread with him, but the shoemaker shoved it in his pocket.

After a while, when they had left the village and gone into a forest, the tailor asked for his half bread.

"I am not hungry yet," said the shoemaker.

"Not hungry?" cried the tailor and stopped, with legs shaking. "What kind of monster are you?"

"Glutton!" the shoemaker sneered back to him. "You have cost me my very last money!"

"But it was you who persuaded me to go with you, and made me pass by all opportunities for work!" said the tailor with difficulty, for he was very weak and his tongue stuck to the palate.

"You will not get your half for free," said the shoemaker. "That bread in my pocket is as dear to me as two eyes. I will give you half the bread for one of your eyes."

"Goodness graceous!" the tailor could not believe it, and stretched out his hand for half the bread, ate it, and the shoemaker stabbed him in the eye.

The next day the same thing happened. The shoemaker bought a bread and gave the tailor nothing of it until he had promised him his other eye.

"But then I will be blind!" whined the tailor. "Then I can work no more, and cannot even thread a needle."

The wicked Peter said, ""Who is blind sees no evil, nothing false and faithless, and he no longer needs to work, for he is excused. As a rich beggar you can still be rich." The tailor was unable to think clearly because he was near death of starvation, so he got a half bread while the shoemaker made him blind. When that was done, the tailor hoped that at least the shoemaker would guide him. But the other said, "Goodbye, Hans! This is what I wanted to do all along. I can now go back home and marry Lizzie. Take care of yourself."

The shoemaker walked away, while the blinded tailor fainted from weakness, pain and grief. He fell to the ground and lay there unconscious. While he was lying like that three four-footed wayfarers came along the road, a bear, a wolf, and a fox. They sniffed at the unconscious man, and the bear growled, "This man seems dead! I don't care to eat him myself. Do you want him?"

"I ate from a sheep only an hour ago; I'm not hungry just now," said the wolf. "In any case, this fellow is so bony and skinny that he would be as hard on my teeth as a wooden leg!"

"He must have been a tailor, a very lean tailor, poor man!" laughed the fox. "I'd rather eat a fat goose! He can lie there for all I care."

The poor tailor came to himself again and sensed the animals around him and held his breath as best he could. Meanwhile while the three animals lay down in the grass to rest, not far away.

"I see he has been blinded. That is a great misfortune," said the fox, "both for us noble animals and for those who walk about on two legs. If they knew what I know, they would not be blind any longer."

"Oho!" cried the wolf. "I know something too! If the people in the nearby king's city knew it, they would not suffer from drought and thirst , and would not have to pay a gold piece for a small glass of water."

"Hm, hm!" growled the bear. "I know something remarkable too! If you will tell what you two know, I will tell what I know. But we must promise never to give away each others' secrets."

"No, we will not do that!" promised the fox and the wolf, and the fox began to tell, "I know that today is a special night where heavenly dew falls on grass and flowers. Who is blind and bathes his eyes in this dew, will see again."

"That is a wonderful secret," said the wolf, "and here is mine: The wells in the king's city dried up long ago, and the people in it must either die of thirst or leave unless something happens soon. If they only knew they have plenty of water right under their feet! For in the middle of the paving in the market place lies a gray stone; if anyone lifts it up, a spring of water would shoot out of the ground. How glad the people would be to have water again!"

The bear said, "Now hear my secret. The king's only daughter has been sick for seven years and no doctor can help her, for none of them knows what the matter is, wise as they think they are. The king's daughter is so ill that the king has promised to marry her to the man who can heal her. But none can help her, because none else knows what I know!"

"Now you have made us curious!" said the wolf.

The bear growled and said, "Wait a little," and snorted and cleared his throat before he went on, "When the princess was a young girl, she was to throw a piece of gold into the poor box in the church as an offering. But she was young and shy in front of all the people in the church, so she threw the gold piece awkwardly, so that she missed the box and the coin fell into a crack on the floor beneath it. That was when she got her illness, and she will not be well again until the piece of gold is pulled out of the crack and put into the poor box. The cure is simply to go and find the gold piece and let the king's daughter put it into the box."

When the animals had shared these secrets with each other, they got up and went away - the bear went to look for wild honey, and the others went near poulty yards to steal a breakfast if they could.

But the tailor bathed his eyes with the dew that had started to fall, and soon his eyes were as good as new. He felt strangely refreshed, and when night had passed he soon walked further down the road. In some villages he passed through, he got so much food and drink that he felt satisfied, and at last he came to the city where people for the lack of water drank wine and gin instead, even though it was not good for them.

The tailor had no money to by gin for, so he walked into an inn and asked for a large glass of water. The landlady looked at him and said, "If you do not have money enough to gin and wine, you do not have money for water either, for it costs much more around here; it would cost a fortune, really. There is so little water in the city that I do not have anything of it to sell or give away."

"Is it really that dry around here?" asked the tailor. "But I know how to let fresh water well up. Call me a fountain doctor."

Some young nobles in the inn heard him say that. In their extreme need they were drinking champagne and brandy, and hoped to get better things to drink instead. They flocked around the tailor and asked quickly if he could give the city a fountain.

"Yes, I could if I would," said he, "but not for nothing. What I ask for in return is a salary of five or six thousand gold pieces a year, for example."

The town council hastened to consider the tailor's offer, and all the members voted for paying the tailor what he asked for. The head of the counsil was then sent to the king, asking him to make a decree that made the tailor the city's "fountain doctor", his salary paid by the city. The king agreed, but with the reservation that there had to be plenty of water coming if the well doctor was to get a salary.

The tailor now walked to the market and pointed to a grey, square stone in the pavement in the middle of the market. To the officials around him he said, "Gentlemen, let people tdig up that stone!"

As soon as they did, a jet of water sprang high into the air while the onlookers shouted and cried for joy. The same day the king called for the tailor and was very friendly, made him one of his royal advisers. During the reception someone mentioned the disease of the king's daughter, and the king asked his new adviser, "Do you think this sort of welling water have any effect on her disease?"

"Oh no, sire!" answered the 'fountain doctor'. "It is not water than will cure her. But if you will allow me to see her, I may perhaps find out why she is ill."

The king took his new adviser with him to the princess. She was very beautiful. The advisor felt her pulse, and then said, "Sire, if you will permit us to carry her to church, I think she can be healed."

The king welcomed the idea. "It is worth a try," he said.

In the church Sir Hans - the former tailor - was shown the offering box and then looked for and found a crack with a gold piece in it. He gave the gold piece to the princess and asked her to put in the poor box. She did, and at once got well again. Then they went back to the castle and made her father very happy.

The king's new adviser soon became chief minister, and then a count, a prince, and the princess's beloved husband.

After the wedding, the newly married couple went on a journey through the country. They came to the village that Hans once set out from when he was a moneyless tailor. A grinder stood beside the village inn. He was sharpening knives while his wife turned the grindstone for him. It was Peter and Lisa. At first she had not wanted to marry Peter when he returned, but she accepted him in the end, as he swore she would never see Hans again.

Hans recognized them at once, and called out to the coachman to stop. "Peter!" he said.

Peter started and hurried forward, asking what the prince wanted.

"I just want you to recognise what has become of me after you felled me in the woods. I lay under a tree when we parted, all alone and blind. But as I lay there, good fortune came my way, and now I can see again, I have got rich, and now I leave you! Have this purse of money in return for feeding me. Drive on, coachman!"

Peter stood as if he had become lame and stared after the fine-looking coach for some time. Then he gave the money to his wife saying, "That was Hans! I will go and seek my own fortune where he found his."

Off he went as fast as he could go to the place where he had blinded and left the starving Hans. A fox was running ahead of him and stopped at just that spot. Then a wolf came bounding too. Peter turned quickly and saw a bear who was trotting toward him. Peter hastily climbed a tree.

"Traitors! Traitors! Traitors!" barked the fox, and howled the wolf, and growled the bear. They accused each other of telling the secrets they had promised to keep. They grew very angry. In the end the bear and fox sided together against the wolf. They said he was the traitor, so he must be hanged. The fox twisted a rope out of fir twigs and tied a noose in it. The bear held the wolf fast and the fox put the noose around the wolf's neck. But as the wolf was pulled up in the air, he looked up and saw Peter sitting on a branch of the tree. "There is a man in the tree! He could have told our secrets!" he howled.

Now the two other animals looked up and let the wolf fall to the ground. "Let us interrrogate him!" they howled and grunted.

The bear climbed the tree, and with a blow from his forepaw he knocked Peter from the branch. He fell badly and died on the spot.

Friday 21 July 2023

Friday's Sung Word: "Só pra Contrariar" by Noel Rosa and Manuel Ferreira (in Portuguese)

O prazer que tu sentes é quando
Estás me contrariando
Sem razão
Enquanto estou a sorrir
Tu choras sem sentir
Só por contradição (2x)

Não posso mais sofrer assim
Tudo tem que ter seu fim
Não existe eternidade
É melhor viver sozinho
Sem dinheiro, sem carinho
Com sossego e liberdade

Andando em tua companhia
Já peguei esta mania
Das vinganças imprudentes
E quando o jejum me come
Prá contrariar a fome
Fico mastigando os dentes.

 

You can listen "Só pra Contrariar" sung by Bando de Tangarás here.

Thursday 20 July 2023

Thursday's Serial: “The Light of Western Stars” by Zane Grey (in English) - I

 I - A GENTLEMAN OF THE RANGE

When Madeline Hammond stepped from the train at El Cajon, New Mexico, it was nearly midnight, and her first impression was of a huge dark space of cool, windy emptiness, strange and silent, stretching away under great blinking white stars.

“Miss, there's no one to meet you,” said the conductor, rather anxiously.

“I wired my brother,” she replied. “The train being so late—perhaps he grew tired of waiting. He will be here presently. But, if he should not come—surely I can find a hotel?”

“There's lodgings to be had. Get the station agent to show you. If you'll excuse me—this is no place for a lady like you to be alone at night. It's a rough little town—mostly Mexicans, miners, cowboys. And they carouse a lot. Besides, the revolution across the border has stirred up some excitement along the line. Miss, I guess it's safe enough, if you—”

“Thank you. I am not in the least afraid.”

As the train started to glide away Miss Hammond walked towards the dimly lighted station. As she was about to enter she encountered a Mexican with sombrero hiding his features and a blanket mantling his shoulders.

“Is there any one here to meet Miss Hammond?” she asked.

“No sabe, Senora,” he replied from under the muffling blanket, and he shuffled away into the shadow.

She entered the empty waiting-room. An oil-lamp gave out a thick yellow light. The ticket window was open, and through it she saw there was neither agent nor operator in the little compartment. A telegraph instrument clicked faintly.

Madeline Hammond stood tapping a shapely foot on the floor, and with some amusement contrasted her reception in El Cajon with what it was when she left a train at the Grand Central. The only time she could remember ever having been alone like this was once when she had missed her maid and her train at a place outside of Versailles—an adventure that had been a novel and delightful break in the prescribed routine of her much-chaperoned life. She crossed the waiting-room to a window and, holding aside her veil, looked out. At first she could descry only a few dim lights, and these blurred in her sight. As her eyes grew accustomed to the darkness she saw a superbly built horse standing near the window. Beyond was a bare square. Or, if it was a street, it was the widest one Madeline had ever seen. The dim lights shone from low, flat buildings. She made out the dark shapes of many horses, all standing motionless with drooping heads. Through a hole in the window-glass came a cool breeze, and on it breathed a sound that struck coarsely upon her ear—a discordant mingling of laughter and shout, and the tramp of boots to the hard music of a phonograph.

“Western revelry,” mused Miss Hammond, as she left the window. “Now, what to do? I'll wait here. Perhaps the station agent will return soon, or Alfred will come for me.”

As she sat down to wait she reviewed the causes which accounted for the remarkable situation in which she found herself. That Madeline Hammond should be alone, at a late hour, in a dingy little Western railroad station, was indeed extraordinary.

The close of her debutante year had been marred by the only unhappy experience of her life—the disgrace of her brother and his leaving home. She dated the beginning of a certain thoughtful habit of mind from that time, and a dissatisfaction with the brilliant life society offered her. The change had been so gradual that it was permanent before she realized it. For a while an active outdoor life—golf, tennis, yachting—kept this realization from becoming morbid introspection. There came a time when even these lost charm for her, and then she believed she was indeed ill in mind. Travel did not help her.

There had been months of unrest, of curiously painful wonderment that her position, her wealth, her popularity no longer sufficed. She believed she had lived through the dreams and fancies of a girl to become a woman of the world. And she had gone on as before, a part of the glittering show, but no longer blind to the truth—that there was nothing in her luxurious life to make it significant.

Sometimes from the depths of her there flashed up at odd moments intimations of a future revolt. She remembered one evening at the opera when the curtain had risen upon a particularly well-done piece of stage scenery—a broad space of deep desolateness, reaching away under an infinitude of night sky, illumined by stars. The suggestion it brought of vast wastes of lonely, rugged earth, of a great, blue-arched vault of starry sky, pervaded her soul with a strange, sweet peace.

When the scene was changed she lost this vague new sense of peace, and she turned away from the stage in irritation. She looked at the long, curved tier of glittering boxes that represented her world. It was a distinguished and splendid world—the wealth, fashion, culture, beauty, and blood of a nation. She, Madeline Hammond, was a part of it. She smiled, she listened, she talked to the men who from time to time strolled into the Hammond box, and she felt that there was not a moment when she was natural, true to herself. She wondered why these people could not somehow, some way be different; but she could not tell what she wanted them to be. If they had been different they would not have fitted the place; indeed, they would not have been there at all. Yet she thought wistfully that they lacked something for her.

And suddenly realizing she would marry one of these men if she did not revolt, she had been assailed by a great weariness, an icy-sickening sense that life had palled upon her. She was tired of fashionable society. She was tired of polished, imperturbable men who sought only to please her. She was tired of being feted, admired, loved, followed, and importuned; tired of people; tired of houses, noise, ostentation, luxury. She was so tired of herself!

In the lonely distances and the passionless stars of boldly painted stage scenery she had caught a glimpse of something that stirred her soul. The feeling did not last. She could not call it back. She imagined that the very boldness of the scene had appealed to her; she divined that the man who painted it had found inspiration, joy, strength, serenity in rugged nature. And at last she knew what she needed—to be alone, to brood for long hours, to gaze out on lonely, silent, darkening stretches, to watch the stars, to face her soul, to find her real self.

Then it was she had first thought of visiting the brother who had gone West to cast his fortune with the cattlemen. As it happened, she had friends who were on the eve of starting for California, and she made a quick decision to travel with them. When she calmly announced her intention of going out West her mother had exclaimed in consternation; and her father, surprised into pathetic memory of the black sheep of the family, had stared at her with glistening eyes. “Why, Madeline! You want to see that wild boy!” Then he had reverted to the anger he still felt for his wayward son, and he had forbidden Madeline to go. Her mother forgot her haughty poise and dignity. Madeline, however, had exhibited a will she had never before been known to possess. She stood her ground even to reminding them that she was twenty-four and her own mistress. In the end she had prevailed, and that without betraying the real state of her mind.

Her decision to visit her brother had been too hurriedly made and acted upon for her to write him about it, and so she had telegraphed him from New York, and also, a day later, from Chicago, where her traveling friends had been delayed by illness. Nothing could have turned her back then. Madeline had planned to arrive in El Cajon on October 3d, her brother's birthday, and she had succeeded, though her arrival occurred at the twenty-fourth hour. Her train had been several hours late. Whether or not the message had reached Alfred's hands she had no means of telling, and the thing which concerned her now was the fact that she had arrived and he was not there to meet her.

It did not take long for thought of the past to give way wholly to the reality of the present.

“I hope nothing has happened to Alfred,” she said to herself. “He was well, doing splendidly, the last time he wrote. To be sure, that was a good while ago; but, then, he never wrote often. He's all right. Pretty soon he'll come, and how glad I'll be! I wonder if he has changed.”

As Madeline sat waiting in the yellow gloom she heard the faint, intermittent click of the telegraph instrument, the low hum of wires, the occasional stamp of an iron-shod hoof, and a distant vacant laugh rising above the sounds of the dance. These commonplace things were new to her. She became conscious of a slight quickening of her pulse. Madeline had only a limited knowledge of the West. Like all of her class, she had traveled Europe and had neglected America. A few letters from her brother had confused her already vague ideas of plains and mountains, as well as of cowboys and cattle. She had been astounded at the interminable distance she had traveled, and if there had been anything attractive to look at in all that journey she had passed it in the night. And here she sat in a dingy little station, with telegraph wires moaning a lonely song in the wind.

A faint sound like the rattling of thin chains diverted Madeline's attention. At first she imagined it was made by the telegraph wires. Then she heard a step. The door swung wide; a tall man entered, and with him came the clinking rattle. She realized then that the sound came from his spurs. The man was a cowboy, and his entrance recalled vividly to her that of Dustin Farnum in the first act of “The Virginian.”

“Will you please direct me to a hotel?” asked Madeline, rising.

The cowboy removed his sombrero, and the sweep he made with it and the accompanying bow, despite their exaggeration, had a kind of rude grace. He took two long strides toward her.

“Lady, are you married?”

In the past Miss Hammond's sense of humor had often helped her to overlook critical exactions natural to her breeding. She kept silence, and she imagined it was just as well that her veil hid her face at the moment. She had been prepared to find cowboys rather striking, and she had been warned not to laugh at them.

This gentleman of the range deliberately reached down and took up her left hand. Before she recovered from her start of amaze he had stripped off her glove.

“Fine spark, but no wedding-ring,” he drawled. “Lady, I'm glad to see you're not married.”

He released her hand and returned the glove.

“You see, the only ho-tel in this here town is against boarding married women.”

“Indeed?” said Madeline, trying to adjust her wits to the situation.

“It sure is,” he went on. “Bad business for ho-tels to have married women. Keeps the boys away. You see, this isn't Reno.”

Then he laughed rather boyishly, and from that, and the way he slouched on his sombrero, Madeline realized he was half drunk. As she instinctively recoiled she not only gave him a keener glance, but stepped into a position where a better light shone on his face. It was like red bronze, bold, raw, sharp. He laughed again, as if good-naturedly amused with himself, and the laugh scarcely changed the hard set of his features. Like that of all women whose beauty and charm had brought them much before the world, Miss Hammond's intuition had been developed until she had a delicate and exquisitely sensitive perception of the nature of men and of her effect upon them. This crude cowboy, under the influence of drink, had affronted her; nevertheless, whatever was in his mind, he meant no insult.

“I shall be greatly obliged if you will show me to the hotel,” she said.

“Lady, you wait here,” he replied, slowly, as if his thought did not come swiftly. “I'll go fetch the porter.”

She thanked him, and as he went out, closing the door, she sat down in considerable relief. It occurred to her that she should have mentioned her brother's name. Then she fell to wondering what living with such uncouth cowboys had done to Alfred. He had been wild enough in college, and she doubted that any cowboy could have taught him much. She alone of her family had ever believed in any latent good in Alfred Hammond, and her faith had scarcely survived the two years of silence.

Waiting there, she again found herself listening to the moan of the wind through the wires. The horse outside began to pound with heavy hoofs, and once he whinnied. Then Madeline heard a rapid pattering, low at first and growing louder, which presently she recognized as the galloping of horses. She went to the window, thinking, hoping her brother had arrived. But as the clatter increased to a roar, shadows sped by—lean horses, flying manes and tails, sombreroed riders, all strange and wild in her sight. Recalling what the conductor had said, she was at some pains to quell her uneasiness. Dust-clouds shrouded the dim lights in the windows. Then out of the gloom two figures appeared, one tall, the other slight. The cowboy was returning with a porter.

Heavy footsteps sounded without, and lighter ones dragging along, and then suddenly the door rasped open, jarring the whole room. The cowboy entered, pulling a disheveled figure—that of a priest, a padre, whose mantle had manifestly been disarranged by the rude grasp of his captor. Plain it was that the padre was extremely terrified.

Madeline Hammond gazed in bewilderment at the little man, so pale and shaken, and a protest trembled upon her lips; but it was never uttered, for this half-drunken cowboy now appeared to be a cool, grim-smiling devil; and stretching out a long arm, he grasped her and swung her back to the bench.

“You stay there!” he ordered.

His voice, though neither brutal nor harsh nor cruel, had the unaccountable effect of making her feel powerless to move. No man had ever before addressed her in such a tone. It was the woman in her that obeyed—not the personality of proud Madeline Hammond.

The padre lifted his clasped hands as if supplicating for his life, and began to speak hurriedly in Spanish. Madeline did not understand the language. The cowboy pulled out a huge gun and brandished it in the priest's face. Then he lowered it, apparently to point it at the priest's feet. There was a red flash, and then a thundering report that stunned Madeline. The room filled with smoke and the smell of powder. Madeline did not faint or even shut her eyes, but she felt as if she were fast in a cold vise. When she could see distinctly through the smoke she experienced a sensation of immeasurable relief that the cowboy had not shot the padre. But he was still waving the gun, and now appeared to be dragging his victim toward her. What possibly could be the drunken fool's intention? This must be, this surely was a cowboy trick. She had a vague, swiftly flashing recollection of Alfred's first letters descriptive of the extravagant fun of cowboys. Then she vividly remembered a moving picture she had seen—cowboys playing a monstrous joke on a lone school-teacher. Madeline no sooner thought of it than she made certain her brother was introducing her to a little wild West amusement. She could scarcely believe it, yet it must be true. Alfred's old love of teasing her might have extended even to this outrage. Probably he stood just outside the door or window laughing at her embarrassment.

Anger checked her panic. She straightened up with what composure this surprise had left her and started for the door. But the cowboy barred her passage—grasped her arms. Then Madeline divined that her brother could not have any knowledge of this indignity. It was no trick. It was something that was happening, that was real, that threatened she knew not what. She tried to wrench free, feeling hot all over at being handled by this drunken brute. Poise, dignity, culture—all the acquired habits of character—fled before the instinct to fight. She was athletic. She fought. She struggled desperately. But he forced her back with hands of iron. She had never known a man could be so strong. And then it was the man's coolly smiling face, the paralyzing strangeness of his manner, more than his strength, that weakened Madeline until she sank trembling against the bench.

“What—do you—mean?” she panted.

“Dearie, ease up a little on the bridle,” he replied, gaily.

Madeline thought she must be dreaming. She could not think clearly. It had all been too swift, too terrible for her to grasp. Yet she not only saw this man, but also felt his powerful presence. And the shaking priest, the haze of blue smoke, the smell of powder—these were not unreal.

Then close before her eyes burst another blinding red flash, and close at her ears bellowed another report. Unable to stand, Madeline slipped down onto the bench. Her drifting faculties refused clearly to record what transpired during the next few moments; presently, however, as her mind steadied somewhat, she heard, though as in a dream, the voice of the padre hurrying over strange words. It ceased, and then the cowboy's voice stirred her.

“Lady, say Si—Si. Say it—quick! Say it—Si!”

From sheer suggestion, a force irresistible at this moment when her will was clamped by panic, she spoke the word.

“And now, lady—so we can finish this properly—what's your name?”

Still obeying mechanically, she told him.

He stared for a while, as if the name had awakened associations in a mind somewhat befogged. He leaned back unsteadily. Madeline heard the expulsion of his breath, a kind of hard puff, not unusual in drunken men.

“What name?” he demanded.

“Madeline Hammond. I am Alfred Hammond's sister.”

He put his hand up and brushed at an imaginary something before his eyes. Then he loomed over her, and that hand, now shaking a little, reached out for her veil. Before he could touch it, however, she swept it back, revealing her face.

“You're—not—Majesty Hammond?”

How strange—stranger than anything that had ever happened to her before—was it to hear that name on the lips of this cowboy! It was a name by which she was familiarly known, though only those nearest and dearest to her had the privilege of using it. And now it revived her dulled faculties, and by an effort she regained control of herself.

“You are Majesty Hammond,” he replied; and this time he affirmed wonderingly rather than questioned.

Madeline rose and faced him.

“Yes, I am.”

He slammed his gun back into its holster.

“Well, I reckon we won't go on with it, then.”

“With what, sir? And why did you force me to say Si to this priest?”

“I reckon that was a way I took to show him you'd be willing to get married.”

“Oh!... You—you!...” Words failed her.

This appeared to galvanize the cowboy into action. He grasped the padre and led him toward the door, cursing and threatening, no doubt enjoining secrecy. Then he pushed him across the threshold and stood there breathing hard and wrestling with himself.

“Here—wait—wait a minute, Miss—Miss Hammond,” he said, huskily. “You could fall into worse company than mine—though I reckon you sure think not. I'm pretty drunk, but I'm—all right otherwise. Just wait—a minute.”

She stood quivering and blazing with wrath, and watched this savage fight his drunkenness. He acted like a man who had been suddenly shocked into a rational state of mind, and he was now battling with himself to hold on to it. Madeline saw the dark, damp hair lift from his brows as he held it up to the cool wind. Above him she saw the white stars in the deep-blue sky, and they seemed as unreal to her as any other thing in this strange night. They were cold, brilliant, aloof, distant; and looking at them, she felt her wrath lessen and die and leave her calm.

The cowboy turned and began to talk.

“You see—I was pretty drunk,” he labored. “There was a fiesta—and a wedding. I do fool things when I'm drunk. I made a fool bet I'd marry the first girl who came to town.... If you hadn't worn that veil—the fellows were joshing me—and Ed Linton was getting married—and everybody always wants to gamble.... I must have been pretty drunk.”

After the one look at her when she had first put aside her veil he had not raised his eyes to her face. The cool audacity had vanished in what was either excessive emotion or the maudlin condition peculiar to some men when drunk. He could not stand still; perspiration collected in beads upon his forehead; he kept wiping his face with his scarf, and he breathed like a man after violent exertions.

“You see—I was pretty—” he began.

“Explanations are not necessary,” she interrupted. “I am very tired—distressed. The hour is late. Have you the slightest idea what it means to be a gentleman?”

His bronzed face burned to a flaming crimson.

“Is my brother here—in town to-night?” Madeline went on.

“No. He's at his ranch.”

“But I wired him.”

“Like as not the message is over in his box at the P.O. He'll be in town to-morrow. He's shipping cattle for Stillwell.”

“Meanwhile I must go to a hotel. Will you please—”

If he heard her last words he showed no evidence of it. A noise outside had attracted his attention. Madeline listened. Low voices of men, the softer liquid tones of a woman, drifted in through the open door. They spoke in Spanish, and the voices grew louder. Evidently the speakers were approaching the station. Footsteps crunching on gravel attested to this, and quicker steps, coming with deep tones of men in anger, told of a quarrel. Then the woman's voice, hurried and broken, rising higher, was eloquent of vain appeal.

The cowboy's demeanor startled Madeline into anticipation of something dreadful. She was not deceived. From outside came the sound of a scuffle—a muffled shot, a groan, the thud of a falling body, a woman's low cry, and footsteps padding away in rapid retreat.

Madeline Hammond leaned weakly back in her seat, cold and sick, and for a moment her ears throbbed to the tramp of the dancers across the way and the rhythm of the cheap music. Then into the open door-place flashed a girl's tragic face, lighted by dark eyes and framed by dusky hair. The girl reached a slim brown hand round the side of the door and held on as if to support herself. A long black scarf accentuated her gaudy attire.

“Senor—Gene!” she exclaimed; and breathless glad recognition made a sudden break in her terror.

“Bonita!” The cowboy leaped to her. “Girl! Are you hurt?”

“No, Senor.”

He took hold of her. “I heard—somebody got shot. Was it Danny?”

“No, Senor.”

“Did Danny do the shooting? Tell me, girl.”

“No, Senor.”

“I'm sure glad. I thought Danny was mixed up in that. He had Stillwell's money for the boys—I was afraid.... Say, Bonita, but you'll get in trouble. Who was with you? What did you do?”

“Senor Gene—they Don Carlos vaqueros—they quarrel over me. I only dance a leetle, smile a leetle, and they quarrel. I beg they be good—watch out for Sheriff Hawe... and now Sheriff Hawe put me in jail. I so frighten; he try make leetle love to Bonita once, and now he hate me like he hate Senor Gene.”

“Pat Hawe won't put you in jail. Take my horse and hit the Peloncillo trail. Bonita, promise to stay away from El Cajon.”

“Si, Senor.”

He led her outside. Madeline heard the horse snort and champ his bit. The cowboy spoke low; only a few words were intelligible—“stirrups... wait... out of town... mountain... trail ... now ride!”

A moment's silence ensued, and was broken by a pounding of hoofs, a pattering of gravel. Then Madeline saw a big, dark horse run into the wide space. She caught a glimpse of wind-swept scarf and hair, a little form low down in the saddle. The horse was outlined in black against the line of dim lights. There was something wild and splendid in his flight.

Directly the cowboy appeared again in the doorway.

“Miss Hammond, I reckon we want to rustle out of here. Been bad goings-on. And there's a train due.”

She hurried into the open air, not daring to look back or to either side. Her guide strode swiftly. She had almost to run to keep up with him. Many conflicting emotions confused her. She had a strange sense of this stalking giant beside her, silent except for his jangling spurs. She had a strange feeling of the cool, sweet wind and the white stars. Was it only her disordered fancy, or did these wonderful stars open and shut? She had a queer, disembodied thought that somewhere in ages back, in another life, she had seen these stars. The night seemed dark, yet there was a pale, luminous light—a light from the stars—and she fancied it would always haunt her.

Suddenly aware that she had been led beyond the line of houses, she spoke:

“Where are you taking me?”

“To Florence Kingsley,” he replied.

“Who is she?”

“I reckon she's your brother's best friend out here.” Madeline kept pace with the cowboy for a few moments longer, and then she stopped. It was as much from necessity to catch her breath as it was from recurring fear. All at once she realized what little use her training had been for such an experience as this. The cowboy, missing her, came back the few intervening steps. Then he waited, still silent, looming beside her.

“It's so dark, so lonely,” she faltered. “How do I know... what warrant can you give me that you—that no harm will befall me if I go farther?”

“None, Miss Hammond, except that I've seen your face.”

Wednesday 19 July 2023

Good Reading: “A Santa Inês” by St. Joseph of Anchieta (in Portuguese)

 

Na vinda de sua Imagem

 

Cordeirinha linda,

Como folga o povo,

Porque vossa vinda

Lhe dá lume novo.

 

Cordeirinha santa,

De Jesus querida,

Vossa santa vida

O Diabo espanta.

Por isso vos canta

Com prazer o povo,

Porque vossa vinda

Lhe dá lume novo.

 

Nossa culpa escura

Fugirá depressa,

Pois vossa cabeça

Vem com luz tão pura. 

Vossa formosura

Honra é do povo,

Porque vossa vinda

Lhe dá lume novo.

 

Virginal cabeça,

Pela fé cortada,

Com vossa chegada

Já ninguém pereça;

Vinde mui depressa

Ajudar o povo,

Pois com vossa vinda

Lhe dais lume novo.

 

Vós sois cordeirinha

De Jesus Fermoso;

Mas o vosso Esposo

já vos fez Rainha.

Também padeirinha

Sois do vosso Povo,

pois com vossa vinda,

Lhe dais trigo novo.

 

Não é de Alentejo

Este vosso trigo,

Mas Jesus amigo

É vosso desejo.

Morro, porque vejo

Que este nosso povo

Não anda faminto

Deste trigo novo.

 

Santa Padeirinha,

Morta com cutelo,

Sem nenhum farejo

É vossa farinha

Ela é mezinha

Com que sara o povo

Que com vossa vinda

Terá trigo novo.

 

O pão, que amassasses

Destro em vosso peito,

É o amor perfeito

Com que Deus amastes. 

Deste vos fartasses,

Deste dais ao povo,

Por que deixe o velho

Pelo trigo novo.

 

Não se vende em praça,

Este pão da vida,

Porque é comida

Que se dá de graça.

Oh preciosa massa!

Oh que pão tão novo

Que com vossa vinda

Quer Deus dar ao povo!

 

Oh que doce bolo

Que se chama graça!

Quem sem ela passa

É mui grande tolo,

Homem sem miolo

 

Qualquer deste povo

Que não é faminto

Deste pão tão novo.